
L’ancien ministre des Affaires étrangères sénégalais vient d’être
inculpé aux États-Unis pour une
affaire de pots-de-vin. Il risque
jusqu’à vingt ans de prison.
Dans le monde des affaires, un copieux carnet d’adresses peut rapporter gros… et coûter cher. Cheikh Tidiane Gadio
en a fait l’amère expérience. Interpellé aux États-Unis, dont il est
résident permanent, celui qui fut le ministre des Affaires étrangères
d’Abdoulaye Wade de 2000 à 2009 a été inculpé, le 20 novembre, par la
justice fédérale dans une sombre affaire de corruption et de
blanchiment.
Ancien coordinateur pour l’Afrique occidentale d’un
programme de la Banque mondiale, Cheikh Tidiane Gadio, 61 ans, a de
l’entregent. Après avoir dirigé la diplomatie sénégalaise, le fondateur
du Mouvement panafricain et citoyen Luy Jot Jotna (MPCL) se présente en
2012 à la présidentielle – où il ne recueille qu’un score anecdotique.
Dans la foulée, il fonde l’Institut panafricain de
stratégies (IPS), un think tank censé œuvrer à « l’unité continentale ».
En parallèle, il dirige un cabinet de consulting. Ce mélange des genres
est en partie à l’origine de ses ennuis. Car en 2014, l’une de ses
connaissances, Patrick Ho Chi-ping, le sollicite pour aider la société
chinoise CEFC China Energy à obtenir des concessions au Tchad. Gadio,
qui entretient des liens étroits avec Idriss Déby Itno, accepte de jouer les entremetteurs.
Transferts d’argent douteux
En novembre 2014, selon les échanges de courriers aux mains
des enquêteurs, Gadio écrit à son interlocuteur pour se féliciter des
résultats de son intervention. Il lui suggère au passage de remercier le
président Déby Itno par « un joli package financier », évoquant la
possibilité d’une donation au profit de ses « projets sociaux » ou la
création d’un hôpital.
Pour l’heure, rien dans l’acte d’accusation ne démontre un
quelconque échange d’argent entre la société chinoise et l’État
tchadien. En revanche, les traces de deux virements de 200 000 dollars
(165 000 euros) à son profit valent à Cheikh Tidiane Gadio la menace
d’un procès pour violation du Foreign Corrupt Practices Act.
« Les lobbyistes pullulent aux États-Unis. Ils ont pignon
sur rue, font des offres de services aussi alléchantes les unes que les
autres », relativise l’ancien ministre sénégalais Amadou Tidiane Wone.
Actuellement dans l’attente d’une libération sous caution, Gadio devra
convaincre ses juges qu’il n’a pas franchi la ligne jaune.
Source: Jeune Afrique

