
La confusion règne de nouveau à dix jours de l'ouverture de la
campagne pour les élections du 23
décembre en République démocratique du Congo, où le candidat unique de l'opposition Martin Fayulu s'est déclaré "révulsé" par la volte-face de deux ténors qui lui ont brutalement retiré leur soutien.
décembre en République démocratique du Congo, où le candidat unique de l'opposition Martin Fayulu s'est déclaré "révulsé" par la volte-face de deux ténors qui lui ont brutalement retiré leur soutien.
Dans le cadre d'une présidentielle à un tour, l'opposition affirmait
vouloir un "candidat commun" face au "dauphin" du président Joseph
Kabila, au pouvoir depuis 2001 et qui ne pouvait pas se représenter.
Les partenaires étrangers de la RDC (Nations unies, Etats-Unis,
France, Belgique, Afrique du Sud...) croisaient les doigts en rêvant
d'une première "transition pacifique" dans le plus grand pays d'Afrique
sub-saharienne, susceptible d'inspirer toute l'Afrique centrale.
La donne s'est compliquée lundi soir quand Félix Tshisekedi (UDPS) et
Vital Kamerhe (UNC) ont dénoncé l'accord conclu la veille à sept pour
désigner à la surprise générale l'outsider Martin Fayulu comme candidat
commun de l'opposition.
"L'accord existe toujours", a déclaré M. Fayulu sur TV5Monde, dans sa
première réaction à la volte-face de MM. Tshisekedi et Kamerhe qui
affirment avoir agi sous la pression de leur base.
"C'est extrêmement grave. Quel signal donnons-nous aux enfants et à
la population, surtout nous dans l'opposition qui disons tout le temps
que le pouvoir +kabiliste+ ne respecte pas la Constitution?", s'est-il
emporté sous le coup de ce dernier avatar d'un grand classique de la
politique congolaise: la division des opposants.
"J'invite mes frères (Tshisekedi et Kamerhe) à dépasser les
considérations partisanes et à privilégier l'intérêt supérieur de la
Nation. Il n'est jamais trop tard pour bien faire", a tempéré mardi
après-midi dans un tweet M. Fayulu.
"Pour l'instant le dialogue est rompu", a déclaré un responsable de
l'UDPS à Bruxelles où se trouve toujours M. Tshisekedi, qui pourrait
rentrer samedi à Kinshasa.
Report des élections
Les partisans de MM. Tshisekedi et Kamerhe leur demandent de
maintenir leur candidature, alors que l'accord de Genève envisageait le
"retrait par solidarité" au profit du candidat commun.
Cet accord a également été signé par deux autres ténors, Moïse
Katumbi et Jean-Pierre Bemba, qui n'ont pas pu se présenter à l'élection
présidentielle.
L'accord révélé par Jeune Afrique envisageait aussi l'hypothèse de
"la non-tenue de l'élection présidentielle", avec dans ce cas une
réunion d'une "conférence des leaders" pour "statuer sur les options
nouvelles, l'issue de la candidature commune et les stratégies à
adopter".
Cet éventuel nouveau report des élections - le mandat de Joseph
Kabila s'est achevé en décembre 2016 - a embrasé la base de l'UDPS, le
parti de M. Tshisekedi.
"Nous avons estimé que nos amis +invalidés+ (ndr: MM. Katumbi et
Bemba) n'étaient pas sincères avec nous, qu'ils voulaient nous amener
vers un boycott, un chemin dangereux pour la RDC", avait déclaré lundi
le secrétaire général de l'UDPS Jean-Marc Kabund.
"Il nous a fallu verser le sang dans ce pays pour que Kabila accepte
d'organiser les élections. Et nous allons sacrifier tous ces efforts ?
Nous ne pouvons pas admettre tout cela", a-t-il ajouté.
L'UDPS veut des élections coûte que coûte le 23 décembre, et avec ou
sans la "machine à voter" (qui permettront aux électeurs de choisir les
candidats et d'imprimer les bulletins de vote), rejetée par les autres
signataires.
"Notre Congo mérite mieux"
Ces divisions au sein de l'opposition arrangent le Front commun du
Congo (FCC) constitué autour du président Kabila et de l'homme qu'il
soutient pour lui succéder, l'ex-ministre de l'Intérieur et patron du
parti présidentiel Emmanuel Ramazani Shadary.
"Que tous ceux et celles qui sont profondément déçus par cette énième
trahison de notre peuple par les leaders de l'opposition congolaise au
service d'une cause étrangère à l'intérêt national, rejoignent le camp
du Congo, le FCC", a tweeté le camp présidentiel.
Les querelles de l'opposition désolent le mouvement citoyen
anti-Kabila Lutte pour le changement (Lucha): "Nous n'avons d'autres
choix que de réinventer par nous-même (...) le changement que nous
voulons (...). Assez! Notre Congo mérite mieux".
Les spéculations vont bon train sur les raisons profondes du retournement de MM. Tshisekedi.
Le quotidien Le Potentiel voit la "main noire" des services de
renseignement derrière la fronde de leurs militants: "Des observateurs
avertis de la scène politique s'accordent pour dire que les services ont
travaillé au corps les partisans de l'UDPS et de l'UNC".
Autre hypothèse: floués par MM. Katumbi et Bemba, MM. Tshisekedi et
Kamerhe avaient prévu un coup de billard à trois bandes en faisant mine
de découvrir la colère de leur base...
En attendant, il reste toujours 21 candidats en course à l'élection
présidentielle toujours prévue le 23 décembre, en même temps que les
législatives et les provinciales. Et MM. Tshisekedi et Kamerhe ont les
faveurs d'un sondage qui place le candidat du pouvoir en troisième
position derrière eux deux.
VOA Avec AFP

