l sait, mais ne dira rien avant le second tour: ce vendredi, Emmanuel
Macron confie sur RTL avoir choisi "in petto" qui sera son Premier
ministre en cas de victoire dimanche soir, face à Marine Le
Pen. Le
leader d'En Marche!, qui hésitait jusqu'alors entre deux profils - "un
homme ou une femme", glissait-il sur notre antenne, a finalement
tranché. Tout au long de la campagne, le prétendant à l'Élysée a laissé
des indices sur l'identité du chef de son éventuel gouvernement,
indiquant les critères qui président à son choix.
Critères difficilement conciliables
Sur
RTL en mars, le candidat avait fait de "la capacité à tenir une
majorité parlementaire de projet" un prérequis. "Ça veut dire qu'il
faudra qu'il ou elle ait une forte expérience de l'art parlementaire et
de la capacité à gouverner", avait-il expliqué. Ce vendredi dans Le
Parisien, et toujours en cas de victoire, Emmanuel Macron indique que ce
Premier ministre de début de mandat "aura vocation à mener le combat"
des législatives. "Ce sera quelqu'un qui a déjà une expérience
politique, c'est indéniable", a-t-il ajouté.
Le 8 mars, le
candidat d'En Marche! avait affirmé qu'il aimerait nommer une femme:
"C'est plutôt mon souhait", avait-il déclaré au Théâtre Antoine lors de
la Journée des droits des femmes. Avec une réserve de taille:
"Je
ne vais pas choisir un Premier ministre parce que c'est une femme. Je
choisirai le Premier ministre le plus compétent, le plus capable
possible."
Par ailleurs, Emmanuel Macron a indiqué qu'il "ne
souhaitait pas avoir d'anciens ministres au gouvernement". "Je prône le
renouveau des visages, il s'applique pour l'équipe gouvernementale de
manière très claire", a affirmé l'ancien ministre lors d'une conférence
de presse fin mars.
En résumé: le Premier ministre idéal
d'Emmanuel Macron serait une femme avec suffisamment peu d'expérience
pour pouvoir incarner un renouveau, assez pour diriger un gouvernement
et piloter une majorité, et trop peu pour avoir été aux responsabilités.
Un casse-tête auquel s'ajoute la dimension "transpartisane" de la
démarche d'Emmanuel Macron, ainsi que l'arbitraire du chef de l'État,
qui pourrait s'autoriser une entorse à un ou plusieurs de ces critères.
Barons socialistes et société civile
Si
les noms de Christine Lagarde et Laurence Parisot ont un temps circulé,
l'absence d'expérience parlementaire de l'une comme de l'autre semblent
rédhibitoires. Laurence Parisot, dont l'étiquette de patronne des
patrons paraît difficile à endosser politiquement, a d'ailleurs été
sèchement éconduite.
De même, il paraît difficile pour le candidat
du "renouvellement" de nommer Jean-Yves Le Drian, ministre pendant tout
le quinquennat de François Hollande, par ailleurs désireux de conserver
son ancrage local en Bretagne. Le même obstacle se pose pour les
profils de Gérard Collomb, qui affirme lui-même ne pas être intéressé
par le poste, Bertrand Delanoë ou François Bayrou, tous vieux routards
de la politique.
L'ouverture à droite
L'hypothèse
d'un Premier ministre de droite, qui aurait l'avantage de semer encore
un peu plus le trouble au sein des Républicains, demeure elle aussi
difficile à mettre en œuvre: le maire du Havre Édouard Philippe incarne
certes l'héritage juppéiste, mais son poids politique reste
modéré. Nathalie Kosciusko-Morizet apparaît quant à elle déjà trop à la
marge au sein des Républicains pour que le jeu politique en vaille la
chandelle.
Valérie Pécresse aurait pu être une option, mais elle
ne semble pas disposée à rejoindre Emmanuel Macron: "J’entends dire que
monsieur Macron veut débaucher des personnalités de la droite et du
centre. Ceux qui se laissent séduire par Emmanuel Macron doivent être
exclus", a-t-elle déclaré mercredi sur France 2.
La piste
privilégiée par le candidat d'En Marche! est bien celle de Xavier
Bertrand, qu'il cite régulièrement comme un membre possible de sa
majorité. Sans refuser ouvertement, le président de la région
Hauts-de-France devra manifestement recevoir de sérieux gages politiques
pour accepter: "Je suis un homme de la droite et du centre, je resterai
un homme de la droite et du centre", a-t-il prévenu sur RTL Belgique ce
vendredi, ironisant sur "le feuilleton de toute la semaine".
Les proches macronistes
Restent
trois profils qui cochent chacun plusieurs des critères d'Emmanuel
Macron, mais limitent une éventuelle stratégie d'ouverture. Richard
Ferrand, secrétaire général d'En Marche!, est déjà au cœur du réacteur
pour mener les législatives. Député du Finistère depuis 2012, il a
été conseiller au cabinet du secrétaire d'État aux Affaires sociales et à
l'intégration Kofi Yamgnane en 1991. Figure méconnue du grand public,
il incarne un certain renouveau tout en ayant déjà un certain bagage
politique.
Anne-Marie Idrac a, quant à elle, l'avantage de réunir
expérience parlementaire - elle a été députée des Yvelines jusqu'en 2002
- et connaissance de l'entreprise, puisqu'elle a présidé la RATP puis
la SNCF. La centriste de 65 ans, ancienne "juppette" et cheville
ouvrière du rapprochement entre Emmanuel Macron et François
Bayrou, a certes fait partie de deux gouvernements, mais à des postes de
secrétaire d'État (Transports et Commerce extérieur) relativement
peu exposés politiquement.
Enfin, Sylvie Goulard a elle aussi de
sérieuses chances pour Matignon. Députée européenne depuis 2009, cette
énarque a notamment organisé la rencontre entre Emmanuel Macron et
Angela Merkel. En 1989, elle faisait partie de l'équipe française
chargée des négociations pour la réunification de l'Allemagne. La
centriste n'a jamais participé à aucun gouvernement et correspond assez
bien au "renouveau" souhaité par Emmanuel Macron.

