Dans la nuit de mardi à mercredi, des militaires zimbabwéens ont
indiqué à la télévision publique que
leur intervention en cours ne
visait que les « criminels » de l'entourage du président Robert Mugabe
et qu'il ne s'agissait pas d'un « coup d'État militaire ». Une formule
qui rappelle bien d'autres prises de pouvoir sur le continent.
« Les forces de défense du Zimbabwe sont en train de
pacifier la situation politique, sociale et économique du pays. »
Lorsqu’il apparaît vers 4 heures du matin à la télévision publique ZBC, ce mercredi 15 novembre, le général Sibusio Moyo pèse chaque mot de sa déclaration.
« Nous voulons être très clairs sur le fait que nous ne faisons pas un
coup d’État », insiste cet officier qui se présente comme le
porte-parole de l’armée.
À l’aube, des chars militaires déjà déployés dans la journée du 14 novembre dans les rues de Harare se
sont positionnés près du Parlement, y établissant des barrages. Des
blindés contrôlent désormais les accès au siège du Zanu-PF, parti au
pouvoir, où le président Robert Mugabe réunit habituellement son
gouvernement.
La situation dans le pays demeure certes confuse mais se
dessinent peu à peu les contours d’une prise de pouvoir par la force qui
ne dit pas son nom. Ce qui n’est pas sans rappeler la « révolution pacifique » de Mobutu en septembre 1960
lorsqu’il neutralisa le président congolais Kasa Vubu et son Premier
ministre Évariste Kimba, le « devoir national » qui poussa Zine
el-Abinine Ben Ali à mettre à l’écart le président tunisien Habib
Bourguiba en 1987, ou encore – plus proche de nous – la « seconde
révolution populaire » qui porta, une année plus tard, Abdel Fattah
al-Sissi au pouvoir en 2014 en Égypte.
Sur le continent, « ceci n’est pas un coup d’État » reste
ainsi un classique des renversements des institutions en place dans bien
de pays. Souvenez-vous.
"Ceci n'est PAS un coup d'État"
"Peuple algérien, les hommes qui, aujourd’hui, ont décidé de répondre à ton appel angoissé, persuadés en cela de traduire ton voeu le plus cher, ont pris sur eux de te faire recouvrer ta liberté usurpée et ta dignité bafouée. Un Conseil de la Révolution a été créé. (...), il s’attachera à réunir les conditions pour l’institution d’un État démocratique", Houari Boumediene .
"Ceci n'est PAS un coup d'État"
ALGÉRIE - 19 juin 1965
TUNISIE - 7 novembre 1987
“Face à sa sénilité, et se fondant sur le rapport s’y afférant, le devoir national nous impose de le [Habib Bourguiba] déclarer incompétent et dans l’incapacité absolue d’assurer les charges de président de la République. De ce fait, et en application de la Constitution, nous prenons en charge, avec l’aide du Tout-Puissant, la présidence de la République”, Zine el-Abidine
Ben Ali.
MAURITANIE - 7 août 2008
"Je m’engage personnellement à préserver l’État de droit, les libertés des citoyens et les institutions démocratiques existantes. Ce n’est pas un coup d’État. Il s’agit d’une action destinée à sauver le pays", Mohamed Ould Abdelaziz.
GUINÉE - 25 décembre 2008
“Il aurait été irresponsable de laisser le pays entre les mains d’un gouvernement corrompu et, de surcroît, déchiré par des querelles intestines. L’armée devait prendre ses responsabilités pour mettre fin à des années de dérive”, Moussa Dadis Camara.
ÉGYPTE - 5 juillet 2013
"C’est une seconde révolution populaire. Ce n’est pas un coup d’État militaire. Il est normal que l’armée intervienne pour sauver l’État de droit, appuyer les revendications du peuple et repousser l’islamisation radicale du pays", Mahmoud Badr, chef du mouvement Tamarod.
MALI - 22 mars 2012
BURKINA FASO
17 septembre 2015
"Simple révolution pacifique"
RDC - 14 septembre 1960
“L’armée nationale congolaise a décidé de neutraliser le chef de l’État jusqu’à la date du 31 décembre 1960 (…). Il ne s’agit pas d’un coup d’État militaire, mais plutôt d’une simple révolution pacifique. L’armée va aider le pays à résoudre ses différents problèmes qui deviennent de plus en plus aigus”, Mobutu Sese Seko.
"L’intervention du Conseil national pour la démocratie a pour but d’enclencher un processus cohérent, juste et équilibré, devant conduire à la mise en place d’un système institutionnel robuste", CND.
CÔTE D'IVOIRE -
24 décembre 1999
"J’ai accepté de prendre le pouvoir pour sauver mon pays. (...) Je suis venu balayer la maison, dès qu’elle sera propre, je remettrai le pouvoir au président démocratiquement élu et je m’en irai", Robert Gueï.
NIGER - 18 février 2010
"Le Conseil suprême pour la restauration de la démocratie a décidé de suspendre la Constitution de la VIe République. Nous demandons à la population de garder son calme et de rester unie autour des idéaux qui animent le CSRD et qui pourront faire du Niger un exemple de démocratie", Salou Djibo.
OUGANDA - 29 janvier 1986
Personne ne doit penser que ce qui se passe aujourd’hui, ce qui s’est passé ces derniers jours, est un simple changement de gardes. Je pense que c’est un changement fondamental dans la politique de notre gouvernement, Yoweri Museveni.
Source: Jeune Afrique
Par Jeune Afrique