
Ces derniers mois, la terre d’Houphouët est
devenue un échiquier affichant une des parties les
plus serrées
d’Afrique de l’Ouest. Sur le plateau de jeu, Guillaume Soro a des
allures de fou. La pièce, très proche du roi, voire des rois, et capable
de déplacement originaux, passe ses possibilités en revue. La seule
chose dont on soit sûrs, c’est que Guillaume Soro aimerait bien être
président à la place du président.
En Côte d’Ivoire, Guillaume Soro, le président de
l’Assemblée nationale, envisage de se présenter aux élections
présidentielles de 2020. L’homme a avoué y réfléchir, quelques jours
après que le président ADO a annoncé son intention de passer le relais à
une nouvelle génération.

Les décisions de Guillaume Soro peuvent se révéler assez surprenantes.
Le fait que Guillaume Soro reconnaisse publiquement son
intérêt pour la magistrature suprême ivoirienne a lancé une foison de
scénarios chez les médias et la population. Il faut savoir que les
décisions de Guillaume Soro peuvent se révéler assez surprenantes en
période électorales. Que doit-on donc attendre de lui, maintenant qu’il
reconnaît convoiter le conseil présidentiel ?
La diagonale du fou
Bien malin qui pourrait prévoir les prochains choix de
Guillaume Soro. En 2011, l’homme proche de Laurent Gbagbo avait
finalement pris le parti d’Alassane Ouattara. Selon certains, ce choix
avait été motivé par l’absence de propositions alléchantes de l’ancien
président ivoirien, en cas de victoire. Actuellement, on dit le
président de l’Assemblée nationale déçu que le président Alassane
Ouattara ne le désigne pas comme successeur attitré. De quoi susciter
les attentes d’un geste politique inédit de la part de Guillaume Soro.
La fameuse diagonale du fou. Pour le moment, l’intéressé assure
entretenir une excellente relation avec le président. De l’art de rester
proche des anciens amis comme des plus récents.

Pour le moment, l’intéressé assure entretenir une excellente relation avec le président.
En attendant, le président de l’Assemblée nationale
travaille à lisser son image, à grands coups de campagnes de
communication sur les réseaux sociaux. Il le faut bien. Guillaume Soro,
qui souhaite se présenter sans parti politique, n’aura aucun
passe-droit.
En attendant, le président de l’Assemblée nationale
travaille à lisser son image, à grands coups de campagnes de
communication sur les réseaux sociaux.
Dans cette situation, beaucoup s’attendent à ce que
l’homme tente un coup… de force. Mais, cela ne semble pas à l’ordre du
jour, même si la suspicion à l’égard du PAN ne baisse pas. Rien de
surprenant pour lui. « J’ai l’habitude des procès en sorcellerie », avoue Guillaume Soro. Mais, les craintes quant à ses choix sont-elles si injustifiées que ça.
Ancien chef de guerre
En mai 2017, un véritable arsenal avait été découvert
dans une maison appartenant au directeur du protocole de Guillaume Soro.
En octobre 2015, des grenades et des gilets pare-balles avait été
retrouvés lors d’une perquisition dans une villa de Ouagadougou
appartenant à l’actuel président de l’Assemblée nationale. En mars 2016,
un rapport de l’ONU lui attribue l’acquisition, en Albanie et en
Bulgarie, de 300 tonnes de matériel militaire.

Son passé ouvre la voie à une certaine présomption de culpabilité.
Méfiante envers le personnage, la population ne tarde
pas à lui attribuer les mutineries survenues à la mi-2017, lorsque des
rebelles intégrés à l’armée se sont retournés contre les autorités en
place. S’il est évident que l’homme ne peut vraisemblablement pas être
coupable de tout ce dont il est responsable, son passé ouvre la voie à
une certaine présomption de culpabilité. Né le 8 mai 1972 dans le
département de Ferkessédougou en Côte d’Ivoire.
Pourtant, il s’allie à Robert Guéï, à l’initiative du
putsch, avant de s’opposer à ce dernier pour retourner auprès
d’Alassane Ouattara, en 2000.
A l’université, il s’engage politiquement et dirige la
fédération estudiantine et scolaire de Côte d'Ivoire de 1995 à 1998, en
préparant une licence en anglais. Il étudie ensuite les sciences
politiques en Grande-Bretagne, puis en France.
Il revient sur ses terres après le coup d'État de 1999.
Il crée alors le forum international des étudiants francophones (FIEF)
avant de s'allier politiquement au Rassemblement des républicains
d'Alassane Ouattara. Pourtant, il s’allie à Robert Guéï, à l’initiative
du putsch, avant de s’opposer à ce dernier pour retourner auprès
d’Alassane Ouattara, en 2000. Cette année-là, Guillaume Soro devient le
secrétaire général du mouvement rebelle les Forces nouvelles de Côte
d'Ivoire. A la tête de la milice, il sera un des acteurs majeurs des
heurts intervenus sur le territoire ivoirien entre 2000 et 2003.
Homme politique volage
En février 2003, Guillaume Soro fait partie des
principaux acteurs du gouvernement de réconciliation nationale. Il est
successivement ministre de la communication, ministre d'État puis
ministre de la reconstruction et de la réinsertion, sous la présidence
de Laurent Gbagbo. Après la signature de l’accord de Ouagadougou, ayant
pour but de mettre fin aux conflits ivoiriens, les Forces nouvelles
obtiennent que le premier ministre vienne de leurs rangs.
Le mouvement désigne son secrétaire général Guillaume Soro pour exercer la fonction, en 2007.

Le 29 juin 2007 à Bouaké, Guillaume Soro échappe de peu à un attentat meurtrier.
Problème, Guillaume Soro n’aurait pas consulté
certaines milices de son mouvement avant de signer l’accord de
Ouagadougou. Ces dernières auraient perpétré de nombreuses tentatives
d’assassinat contre lui depuis 2007.
Problème, Guillaume Soro n’aurait pas consulté certaines milices de son mouvement avant de signer l’accord de Ouagadougou.
En 2010, malgré sa proximité avec Laurent Gbagbo, il prend le parti d’Alassane Ouattara lors de la crise post-électorale.
A l’arrivée au pouvoir d’Alassane Ouattara, il est
nommé premier ministre et exerce ses fonctions jusqu’au 8 mars 2012,
date à laquelle il présente sa démission, une fois élu à l’assemblée
nationale. Cette démission alimentera de nombreuses rumeurs de rupture
des relations avec Alassane Ouattara. Mais Guillaume Soro l’assure, ses
relations avec le président sont toujours aussi chaleureuses.

Le président de l’Assemblée nationale ivoirienne a déjà démontré son imprévisibilité.
Le baiser de Judas, avant une nouvelle diagonale de
fou, premier pas d’un programme pour devenir président de la république ?
Certains l’assurent, convaincus de connaître les prochains coups de
Guillaume Soro. Une assurance que même le grand Garry Kasparov ne
pourrait se permettre, tant le président de l’Assemblée nationale
ivoirienne a déjà démontré son imprévisibilité.
Servan Ahougnon
Source: agence ecofin