En Algérie, le chef d'état-major des armées a recommandé, ce mardi, d'engager la procédure qui permettrait de destituer le président Bouteflika. En proposant la mise en œuvre l'article 102 de la Constitution, Ahmed Gaïd Salah confirme que le chef de l'Etat actuel perd l'un des soutiens les plus importants. Une annonce surprenante, mais qui n’a pas convaincu dans le pays.
Ces déclarations Ahmed Gaïd Salah
n’ont pas soulevé une vague de satisfaction dans le pays. D’abord si
l’application de l’article 102 de la Constitution permet le départ du
président Abdelaziz Bouteflika, il ne propose pas de conditions
particulières pour une transition. Parmi les critiques, il y a qu’avec
l’état d’empêchement et avec l’organisation d’élection dans les quatre
mois à venir, on change le président de la République, mais on ne change
pas le système politique. Alors que les demandes des manifestants ont
évolué depuis le début du mouvement.
[Reportage] Plus de scepticisme que de joie dans les rues d'Alger
Autre réticence, c’est celle liée au fait que le chef
d’état-major, et donc l’armée, n’ont pas de rôle prévu dans la
Constitution pour prendre cette décision. Il y avait donc cette crainte
ce lundi que l’armée ne reprenne les rênes du jeu politique.
Le
général Ahmed Gaïd Salah a pris cette décision parce que la pression de
la rue était très importante. Cinq vendredis de manifestations
d’affilée, des manifestations qui rassemblent au moins des centaines de
milliers de personnes dans les grandes villes du pays et qui mobilisent
la population dans le calme, du Nord au Sud, et d’Est en Ouest. C’est
inédit, et surtout cela s’est passé dans le calme.
L’armée, arbitre de la crise
Ahmed Gaïd Salah a
expliqué dans sa déclaration qu’il estimait que, si les manifestations
se poursuivaient, il pouvait y avoir des risques pour la stabilité du
pays. Mais surtout en parallèle, le camp des soutiens du président
Abdelaziz Bouteflika lui se fissure. Les chefs d’entreprise, les
organisations liées à l’histoire de la guerre d’indépendance des membres
du FLN, le premier parti du pays, tous ces gens étaient censés être des
soutiens indéfectibles du président, mais ils ont affirmé leur soutien
au mouvement populaire. C’est d’ailleurs le cas du RND, principal allié
du pouvoir en place, qui ce mardi matin a demandé la démission du
président Bouteflika dans un communiqué.
Donc le chef d’état-major
a pris cette décision qui avait été envisagée, mais qui suscitait
encore des réticences de certains cercles du pouvoir. Et cela lui permet
en quelque sorte de se poser pour le moment en arbitre de la crise.