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Pékin - Huawei réplique: son patron a averti mardi les États-Unis qu’ils « sous-estimaient » son
Ren Zhengfei s’exprimait près d’une semaine après que Washington a
décidé d’interdire aux groupes américains de commercer dans les
télécommunications avec les sociétés étrangères jugées à risque pour la
sécurité nationale -- dont Huawei.
« Le personnel politique américain, par ses façons de faire à
l’heure actuelle, montre qu’il sous-estime notre force », a indiqué M.
Ren dans un entretien avec la presse, retranscrit en direct via
l’application mobile de la télévision d’État CCTV.
Dans un contexte de guerre commerciale et de rivalité
technologique entre Pékin et Washington, le numéro deux mondial des
smartphones et leader de la 5G (cinquième génération de technologie
mobile) est dans le collimateur de l’administration Trump depuis 2018.
« La 5G de Huawei ne sera absolument pas affectée (par tout cela).
En matière de technologie 5G, ce n’est pas en deux-trois ans que les
autres entreprises pourront rattraper Huawei », a promis Ren Zhengfei en
référence aux groupes américains et européens.
Depuis le placement de Huawei sur liste noire par Donald Trump, le
géant informatique Google -- dont le système Android équipe l’immense
majorité des smartphones dans le monde -- a annoncé qu’il allait devoir
couper les ponts avec le groupe chinois.
Ce dernier pourrait ainsi ne plus pouvoir accéder à certains services d’Android et à ses applications Gmail ou Google Maps.
« Pas nous isoler »
La décision de Washington touche aussi de nombreuses entreprises
américaines. Et de grands fabricants de semi-conducteurs comme Qualcomm
ou Intel ont informé leurs employés qu’ils cesseraient, eux aussi, de
fournir Huawei, selon l’agence Bloomberg.
« Nous n’allons pas, à la légère et sur un coup de tête, nous
passer désormais des puces américaines. Nous devons grandir ensemble
(avec ces compagnies) », a plaidé mardi Ren Zhengfei.
« Mais en cas de difficulté d’approvisionnement, nous avons des
solutions de rechange. En période de paix (avant la guerre commerciale,
NDLR), nous nous fournissions pour moitié en puces venant des États-Unis
et pour moitié venant de Huawei. On ne pourra pas nous isoler du reste
du monde », a-t-il martelé.
L’interdiction de commercer imposée par les États-Unis pourrait
porter un coup dur aux grandes entreprises américaines fournissant des
semi-conducteurs au groupe chinois, notent de nombreux experts du
secteur.
« Cela pourrait aussi avoir un effet paralysant sur Huawei »,
estime Roger Kay, analyste chez Endpoint Technologies Associates. «
S’ils n’ont pas les reins solides financièrement, cela pourrait les
entraîner dans un cercle fatal. Si en revanche ils ont les poches
pleines, ils pourront peut-être s’en sortir. »
Dans le monde entier, beaucoup d’utilisateurs de smartphones
Huawei s’interrogent: pourront-ils toujours accéder aux services Google
sur leur appareil?
Délai de 90 jours
Face aux inquiétudes, Washington a semblé vouloir calmer le jeu,
en décrétant lundi un délai de 90 jours avant d’imposer les sanctions.
Une décision jugée mardi « sans grande signification » par Ren
Zhengfei, qui a annoncé que son groupe était déjà en discussion avec
Google afin de chercher des solutions face à l’interdiction de
commercer.
Huawei est depuis 2018 dans le viseur de Washington, qui dit
soupçonner le groupe de permettre aux services de renseignements chinois
d’utiliser son matériel pour espionner les communications sur les
réseaux mobiles dans le monde.
Mais pour le géant des télécoms, Donald Trump cherche avant tout à
enrayer le développement d’une entreprise jugée trop avancée
technologiquement.
Au Canada, allié historique des États-Unis, Huawei est également
au coeur d’une crise diplomatique depuis l’arrestation en décembre, à la
demande de Washington, de la directrice financière du groupe chinois,
Meng Wanzhou.
Soupçonnée de violation des sanctions américaines en Iran, la responsable est également la propre fille de Ren Zhengfei.
« Nous avons sacrifié une personne, une famille. Cela en vue d’un
idéal: atteindre les sommets mondiaux », a souligné mardi le fondateur
de Huawei. « Et pour atteindre cet idéal, un conflit avec les États-Unis
devait arriver tôt ou tard. »
Par Le Journal de Montréal