La situation complexe que traverse actuellement le Tchad avec Glencore Plc, le géant mondial du trading des
matières premières, ne serait pas un cas isolé en zone CEMAC.
Ainsi,
selon des sources auxquelles l'Agence Ecofin a eu accès, la République
du Congo se trouve également en une situation délicate suite à des
transactions menées avec des traders et des banques internationales.
Le
pays d'Afrique centrale est aujourd'hui pointé du doigt par les agences
de notation et des experts de l'économie de la sous-région au sujet de
sa dette en forte hausse, et dont le montant ne serait pas très
clairement défini. Selon certains commentateurs, c'est d'ailleurs la
raison pour laquelle des discussions pour un plan de relance avec le FMI
peinent à avancer.
Bien
que le pays ait obtenu le statut « conforme » dans le cadre de
l'Initiative pour la transparence des industries extractives (ITIE), il
n'a pas expliqué publiquement la situation de sa dette, que des chiffres
alarmistes n'hésitent pas à présenter comme ayant atteint les 100% de
son produit intérieur brut (PIB).
De
sources crédibles, il ressort que le flou dans la dette congolaise,
serait davantage lié à des engagements pris par sa société nationale
pétrolière, la SCNP Congo, avec des traders et des banques
internationales. Il se dit, que l’entité serait allée au-delà de ses
pouvoirs, et aurait reçu de l’argent en avance, de la part d’un trader
et de plusieurs banques internationales, pour du pétrole qui était censé
être livré dans le futur, dans le cadre de ce qu’on appelle des
contrats à terme.
C’est
une pratique assez courante dans les transactions modernes, où deux
parties peuvent convenir de la livraison d’une quantité de marchandise
précise dans le futur, et le vendeur reçoit le prix convenu bien à
l’avance.
Dans
le cas du Congo, la Société Nationale Pétrolière devait livrer des
quantités précises de pétrole. Mais elle ne dispose de ce pétrole que
dans le cadre de ce qu’on appelle « un contrat de partage de
production. »
La
contrainte avec ce type d’accord, c’est que lorsque les prix du baril
sont élevés, la part de production en baril, affectée pour la
compensation des dépenses d’exploitation et d’exploration (fixées en
dollar US) est relativement faible, et les parties dégagent des
cargaisons importantes. Mais lorsque les prix baissent, il faut plus de
baril pour compenser les dépenses et le volume des cargaisons des
associés baisse d’autant.
Nous n’avons obtenu d’indicateurs précis sur le montant de dette concernée, parce que ni le contrat à terme avec les traders, ni les contrats avec les sociétés de productions pétrolières ne sont rendus publics. Mais en 2017, le gouvernement aurait décidé de reprendre la dette de la société des hydrocarbures et de procéder à une évaluation de son poids réel dans la dette publique globale du pays.
La
situation n'est pas très éloignée de celle que vit le Tchad. Le pays du
président Idriss Deby pour sa part, avait obtenu un prêt formel de
Glencore et de banques internationales pour acquérir des actifs
pétroliers. Le remboursement de la dette était adossé sur des volumes de
pétroles à transférer. Avec la baisse des prix, le gouvernement
tchadien recevait moins de cargaisons et ne pouvait honorer facilement
ses engagements.
Que
les pays soient victimes ou coupables dans des processus parfois très
complexes, la question de la relation entre les Etats et leurs
partenaires dans le secteur pétrolier, fait aujourd'hui l'objet de
sérieuses discussions entre la banque centrale (BEAC) et les
gouvernements de la CEMAC. L'institution d'émission monétaire a souhaité
recevoir les contrats miniers et pétroliers, afin d'avoir une
visibilité sur le poids des deux secteurs sur les revenus en devises.
Mais
de sources proches à la BEAC, si les pays membres n'ont pas
formellement marqué leurs refus, aucun n’a encore communiqué ces
contrats à l'institution d'émission monétaire. La question ne manquera
donc pas de faire l'objet de débats lors de la quatrième rencontre du
comité de pilotage du programme de réforme économique de la CEMAC, qui
se tient ce 02 février 2018 à Douala au Cameroun.
Un
des piliers de ce programme est justement l'amélioration des relations
avec les bailleurs de fonds, afin de poursuivre avec la consolidation
des réserves de change. Or le Tchad se trouve dans une situation de
quasi blocage avec le FMI en raison du dossier Glencore. Il n'est pas
exclu, que la république du Congo soit en train d'avancer à petit pas
sur son programme économique en raison du flou qui entoure la situation
de sa dette publique.
Idriss Linge
Investir au cameroun
