Au Tchad, la suspension par le gouvernement de dix partis politiques
d'opposition et l'appel par les
syndicats d'un durcissement de la
grève, en ce jour de « jeudi de la colère » à N'Djamena, amplifie le
climat de tensions dans le pays.
Dix partis politiques
d’opposition, dont celui du député Djimet Clément Bagao, ont été
suspendus ce mercredi 7 février, pour une durée de deux mois. La
veille, le ministre de la
Sécurité, Ahmat Mahamat Bachir, avait prévenu que les partis qui
tenteraient de « défier l’autorité de l’État seraient suspendus ».
Les regroupements de partis politique de l’opposition ne baisseront pas les bras
Cette suspension n’a pourtant pas découragé l’opposition. «
Les regroupements de partis politiques de l’opposition ne baisseront pas
les bras face à un régime totalitaire qui viole à chaque fois les lois
de la République », a ainsi déclaré Bergue Tiergy Fidèle, le
porte-parole de la Coalition de l’opposition politique pour le
redressement et l’alternance au Tchad (Coprat), une plateforme
regroupant plusieurs partis politiques suspendus.
Le « jeudi de la colère »
Après plus de deux semaines de contestations, cette tension
sociale généralisée, soutenue par l’opposition, a pris des allures de
fronde contre le président Idriss Déby Itno (au pouvoir depuis 1990),
qui a interdit toute marche de syndicats, d’associations de la société
civile et de partis politiques.
Idriss Déby n’a pas de position pour le Tchad
Ce jeudi 8 février, des organisations de la société civile,
soutenues par des syndicalistes et quelques membres de l’opposition,
avaient prévu une « marche pacifique » dans la capitale, appelée « jeudi
de la colère ». Mais dans une décision lue à la radio, la vieille, la
marche a été interdite par les autorités, par mesures de « sécurité »,
tout comme la précédente du 25 janvier, dispersée par les forces de
l’ordre.
« [Idriss] Déby n’a pas de position pour le Tchad,
l’endettement de ce pays est hors normes », et ce alors qu’ « il a
récupéré l’argent du pétrole », estime Mahamat Nour Ibedou, porte-parole
de la « marche pacifique » interdite.
Fin du service minimum dans des établissements publics
Dans le même temps, les syndicats à l’origine de l’appel à la grève générale, qui avait commencé le 29 janvier,
ont franchi un nouveau palier dans la contestation en appelant mercredi
7 février à la fin du service minimum dans les établissements publics
de santé.
Nous sommes entrés dans une situation de crise permanente
Cette grève fait suite à la réduction des salaires des agents de l’État et de l’augmentation de l’impôt sur le revenu.
Une partie du secteur privé avait également rejoint le mouvement pour
deux jours, lundi et mardi. S’il est suivi, cet appel pourrait mener à
une grève complète des services de santé au Tchad.
Débutées à la mi-janvier, ces manifestations dénoncent les
coupes dans leurs salaires, avec des baisses de leurs primes et
indemnités. « Le gouvernement a mis à exécution toutes ses menaces qui
pèsent sur les salaires », avaient déploré lundi 29 janvier les
syndicats.
« Nous sommes entrés dans une situation de crise permanente
», avait souligné Michel Barka, le président de l’Union des syndicats du
Tchad (UST), meneur des grèves des travailleurs du privé et du public.
Sévère récession économique
Pays allié de la France et de l’Occident dans la lutte
contre les jihadistes au Sahel, le Tchad traverse depuis deux ans une
sévère récession économique, conséquence de la chute des prix du pétrole
depuis 2014. Près de 40 % de la population de plus de 14 millions
d’habitants vit sous le seuil de pauvreté.
L’État a imposé des mesures d’austérité drastiques,
estimant que le Trésor public n’avait aucun moyen de supporter sa masse
salariale face à un endettement à hauteur de 800 milliards de francs
CFA (1,2 milliard d’euros) auprès des banques commerciales.
Source: Jeune Afrique