
En 2018, la première ministre de l’archipel avait donné naissance à une
petite fille moins d’un an
après son accession à la tête du
gouvernement, faisant du pays un pionnier en matière de visibilité des
jeunes enfants dans la vie publique.
Dans certains parlements, on se bagarre virilement. Dans d’autres, il arrive qu’on se jette des chaussures au visage, que l’on mette la séance en suspens pour cause de reptile importun ou qu’un ministre se fasse interrompre par un assistant vocal un peu trop zélé.
Au Parlement néo-zélandais, on s’occupe tranquillement d’enfants en bas
âge. Mercredi 22 août, en pleine séance, le président de l’Assemblée
législative de l’archipel, Trevor Mallard, a accueilli sur ses genoux un
bébé en pyjama blanc auquel il a donné le biberon. Le petit Tutanekai,
âgé d’un mois seulement, est le fils du député travailliste et ancien
animateur de télévision Tamati Coffey, fraîchement revenu de congé
paternité, et de son conjoint, Tim Smith.
La présence de l’enfant dans l’enceinte du Parlement semble avoir fait
l’unanimité parmi les élus, réjouis de voir la moyenne d’âge de
l’assemblée baisser de manière spectaculaire pour un bref moment. Un élu
écologiste, Gareth Hughes, a exprimé sa joie sur Twitter.
En Nouvelle-Zélande, la vie politique
s’accommode volontiers de la présence de jeunes enfants. Le pays s’est
illustré dans la mise en avant de la compatibilité entre une paternité
ou une maternité attentive et épanouie et la poursuite d’une carrière
publique par définition très prenante.
La première ministre Jacinda Ardern elle-même, avant de susciter l’admiration dans le monde entier par sa réaction humaniste à l’attentat perpétré contre la mosquée de Christchurch, le 15 mars, avait surpris et fait parler d’elle en donnant naissance à un enfant moins d’un an après son accession à la tête du gouvernement.
Inégalités de genre
En septembre 2018, Mme Ardern avait ensuite emmené sa fille Neve Te Aroha, alors âgée de trois mois, à l’Assemblée générale de l’Organisation des Nations unies,
la laissant entre les mains de son conjoint, Clarke Gayford, le temps
d’un discours. L’enfant avait même eu le droit à son badge onusien.
Avant elle, plusieurs femmes élues à travers le monde
avaient choisi de venir siéger accompagnées de leur enfant, comme la
députée italienne Licia Ronzulli, qui avait fait de nombreuses
apparitions dans l’hémicycle du Parlement européen avec sa petite fille
entre 2010 et 2013. Toutes ces images ne sont pas seulement
attendrissantes. Elles contribuent surtout à la défense d’une
conciliation plus harmonieuse des vies personnelle et professionnelle
des parents, en particulier les mères, et reflètent la mutation des
attentes face à un monde du travail dont les contraintes s’opposent le
plus souvent au bonheur familial.
Les inégalités entre les genres sont criantes en la matière. Dans l’étude « Prendre en compte la parentalité dans la vie au travail »,
publiée en février 2019, le Conseil supérieur de l’égalité
professionnelle, une instance rattachée au secrétariat d’Etat chargé de
l’égalité entre les femmes et les hommes et à la lutte contre les
discriminations, a montré que 69 % des mères ont dû modifier leur
organisation du travail après la naissance de leur premier enfant,
contre seulement 29 % des pères dans la même situation.
Par Le Monde