A qui la faute ? Deux jours après les
explosions qui ont frappé Beyrouth, la question est sur toutes les
lèvres. Alors que le Liban cherche un responsable, le directeur général
des douanes du pays, Badri Daher, affirme avoir alerté plusieurs fois la
justice à propos du stock de nitrate d'ammonium entreposé dans le port.
Ce sel blanc et inodore est utilisé dans l'élaboration de nombreux
engrais azotés et a déjà été impliqué dans des accidents mortels par le
passé. En France, on se souvient notamment de l'explosion de l'usine AZF de Toulouse, en 2001.
Or, un stock d'environ 2.750 tonnes de nitrate d'ammonium était
entreposé dans le hangar n°12 du port de Beyrouth. L'épicentre de la
déflagration.
Interrogé par l'Orient le jour,
Badri Daher ne décolère pas : «Nous avons alerté la justice à six
reprises, entre 2014 et jusqu'à récemment, sur la nécessité de
ré-exporter cette marchandise hors du pays. Mais la justice ne nous a
pas écoutés».
Il explique que ce composé chimique était stocké là après l'avarie
d'un cargo moldave, le Rhosus, en 2013. Ce dernier était censé relier la
Géorgie au Mozambique, mais s'est vu interdire de reprendre la mer
après une escale à Beyrouth, en raison de ses problèmes techniques. Dans
ses cales, il y avait 2.750 tonnes de nitrate d'ammonium.
Abandonné par ses propriétaires, le Rhosus a dû être déchargé de sa
cargaison, qui a été placée dans un entrepôt du port. Le n°12.
Badri Daher ne s'estime pas responsable
Selon le directeur général des douanes libanaises, il s'agissait d'une «décision de justice», celle-là même qu'il accuse de ne pas avoir écouté ses mises en garde concernant la dangerosité de cette substance.
Badri Daher estime que sa responsabilité n'est pas engagée dans cette
catastrophe et pointe plutôt la direction du port, qui exploite les
hangars.
Justement à la tête de la société de gestion et d'exploitation du
port de Beyrouth, Hassan Koraytem a évidemment réagi : selon lui
l'entrepôt concerné était gardé depuis six ans par un représentant de la
justice, «sans que la direction du port n'ait le droit de disposer de
cette marchandise».
Alors, à qui la faute ? Pour tenter de répondre à cette question, le
gouvernement libanais a autorisé l'armée à placer en résidence
surveillée toutes les personnes susceptibles d'avoir joué un rôle dans
le stockage du nitrate d'ammonium.
Une commission d'enquête administrative a également été créée, sous
la direction du Premier ministre, Hassan Diab. Les résultats de ses
investigations sont attendus dans cinq jours.
Par
Coralie Rabatel, CNEWS