En 34 ans de pouvoir, plus que jamais, et inexorablement, Paul Biya a
pris le chemin du tribunal de la honte. N'en déplaise à ses mentors, à
son personnel et à tous ceux qui, comme lui, lorsqu'on évoque le sujet
de son départ à la tête du pays, piquent une colère noire au point de
s'oublier dans des propos et des attitudes d'une légèreté affligeante.
Le problème n'est pas d'aimer ou de ne pas aimer l'individu, encore
moins de faire ou de ne pas faire des affaires avec lui, mais c'est que
l'homme est tant convaincu qu'il est un « animal » politique qu’il en
fait un peu trop, au point de jongler avec les principes et les mots
comme si tout était jouable et dépendait juste de sa capacité à "rouler"
les autres dans la farine comme l'ancien "bunkériste" d'Abidjan.
En février 2008 au Cameroun, le régime de Biya a offert un cocktail
explosif de sentiments qui nous a fait "valser" de l'extase au
désappointement total au point que nombreux sont ceux qui se sont mis à
se demander à haute voix s'il y a encore un Etat au Cameroun et si la
sous-région ne courrait pas tout droit vers une implosion dont les
conséquences ne pourraient être qu’effroyablement catastrophiques.
En effet, après nous avoir fait rêver dès son accession au pouvoir en
1982, ses propos rassurants et ses engagements à travailler pour le
développement intégral du Cameroun, il n'a pas trouvé mieux que de faire
prospérer la descente du Cameroun en enfer, pendant que ses sbires et
lui passent le temps à piller l'économie de l'Etat.
C'est nous prendre pour des canards sauvages que de penser que nous
pouvons raisonnablement gober qu'il se représentera à l'élection
présidentielle de 2018. C’est injurier notre intelligence que de vouloir
nous faire croire qu'il demeure le meilleur risque comme le claironne
son entourage.
On a déjà plus d’une fois entendu cette musique. Si en 33 ans, il n'a
rien fait pour le Cameroun, ce n'est pas en se présentant une fois de
plus à l'élection présidentielle de 2018 qu'il fera le miracle. Pour
s’en convaincre, il suffit d’ouvrir les yeux et de voir entre quelles
mains se trouvent les secteurs essentiels de l’économie, du commerce,
des plus importants projets, des sociétés d’Etat, et à qui reviennent
les marchés publics les plus juteux, etc.
A ce très inquiétant et sombre tableau, il faut ajouter la répartition
ségrégationniste des actions de développement, selon les régions du
pays. La fourberie et le mépris du régime pour les autres régions est
constante.
Les hommes politiques et les intellectuels proches du parti au pouvoir,
que nous interpellons aujourd’hui pour leur comportement, le savent et
sont mal dans leur peau. Ils avouent en aparté que la situation est
mauvaise et que les déséquilibres vont croissants. Certains sont bien
conscients, mais d’autres ne prennent conscience des disparités et du
mauvais traitement réservés à eux et à leur région que quand ils tombent
en disgrâce et sont écartés des affaires.
C’est alors qu’ils découvrent leur société de base ainsi que
l’humiliation et le mépris dont ils sont quotidiennement l’objet de la
part de leurs anciens maîtres... Malgré tout, très peu d’entre eux ont
le courage de prendre leurs responsabilités, de réveiller les
consciences et mener les actions utiles pour mettre fin aux inégalités.
Ils s’en trouvent qui se morfondent, s’avilissent davantage, multiplient
les courbettes et le servilisme, vivant dans le sombre espoir de
pouvoir rebondir politiquement un jour ou l’autre. Quelle déchéance et
quelle honte!
D’autres encore sont désabusés, désemparés et sombrent dans le fatalisme
quand ils sont confrontés à la vraie nature de ce régime qui est le
plus cynique de toute l’histoire politique de notre pays. Sous Paul
Biya, les rapports politiques sont très pervertis.
L’un des principes en vigueur est : « dis-moi d’où tu viens et je te
dirai quelle est ta place ». Un simple tour dans les ambassades du
Cameroun à l’étranger en dit long car, la majorité des membres du
personnel sont issus d’une même ethnie… Cette année 2018 est très
déterminante pour notre vie politique. Elle est également jalonnée
d’embûches et de dangers pour notre démocratie et l’unité nationale.
Chaque citoyen et chaque homme politique en particulier doit
s’interroger sur son engagement politique et décider si oui ou non il
faut encore apporter son soutien à Paul Biya et à son système pour
quelques miettes ou encore parce que le régime ferme les yeux sur les
larcins qu’ils commettent ici et là.
Que l’on se comprenne bien ! Nous devons vivre ensemble et nous sommes
tenus de vivre ensemble. C’est pourquoi nous osons dire toutes les
vérités, y compris celles qui dérangent. Notre objectif est de sauver ce
qui peut l’être encore, c’est-à-dire, la paix et la cohésion
nationale.
Il faut que tous les citoyens de ce pays se sentent Camerounais à part
entière et qu’il n’y ait pas certains qui se sentent exclus ou traités
comme des citoyens de seconde zone. C’est bien pourquoi nous mettons le
doigt sur toutes ces questions sans aucun faux-fuyant.
En tout état de cause, l’occasion est donnée aux citoyens d’exprimer
leurs vraies préoccupations et de dire "Non à la candidature de Paul
Biya en 2018", Disons tous non à l'imposture même si nous sommes
convaincus que les responsables du tripatouillage des urnes ne se seront
jamais fatigués devant leur salle besogne.
Paul Biya joue avec l'avenir du Cameroun. En s'accrochant au pouvoir, il
prend tellement de risques qu’infailliblement cela finira par cramer un
jour et pour de vrai. Les conséquences du drame seraient alors si
catastrophiques que le Cameroun « n’enviera » rien au Libéria ou à la
Sierra Léone.
C’est tout naturellement alors que le sort de Biya calquera celui d’un
Hissène Habré obligé de vivre en exil et ne dormir que d’un œil.
Camer.be