Certains pseudo-panafricanistes défendent l’Etat unitaire, avec l’étrange
motif que la Fédération
serait une manière de diviser l’Etat alors qu’on
devrait aller à la construction de blocs plus grands.
Ce genre de sophisme qu’on retrouve dans leur bouche témoigne d’une immense
vacuité de la pensée.
En effet, la Fédération d’un pays relève de la même problématique que
l’Intégration régionale ou continentale, car il s’agit simplement de délester
l’Etat-nation d’une partie de son pouvoir, au profit d’une part, des entités
sub-étatiques (Régions), et d’autre part, des entités supra-étatiques (CEMAC,
CEEAC).
Un Chef d’Etat qui ne peut pas accorder l’autonomie à ses Régions qu’il peut
contrôler, ne peut pas, a fortiori, céder son pouvoir à une entité supérieure
qu’il ne peut pas contrôler.
Et on voit d’ailleurs comment se comportent nos Chefs d’Etat : aucun n’est
prêt d’accorder le moindre pouvoir de contrainte aux organisations régionales
ou continentales.
Il n’y a donc rien à attendre de gens aussi jaloux de leur pouvoir
personnel. La véritable construction d’un Etat africain commencera le jour où
les Chefs d’Etat accepteront de se délester de leur pouvoir pour leurs propres
régions, car cela montrera qu’ils sont aussi prêts à s’en délester pour des
organisations multiétatiques.
Et c’est ici qu’il faut bien voir la dynamique des Etats modernes à travers
le cas de l’Europe : le renforcement de l’Union européenne au détriment des
Etats-nations se fait simultanément avec une extrême décentralisation de ces
Etats-nations. Autrement dit, l’Etat-nation réduit son emprise sur les
populations, au profit de l’Union Européenne par le haut, et au profit des
Régions par le bas.
Cette évolution est imposée par la logique même du modernisme. En effet, la
complexité croissante du monde moderne impose d’une part, des structures
étatiques très puissantes, à même de répondre aux défis de plus en plus lourds
de la mondialisation. D’où la nécessité des anciens Etats-nations de se
regrouper en ensembles plus grands.
Mais au même moment, cette évolution entraîne une telle complexité des
problèmes qu’on ne peut plus les gérer à un niveau aussi élevé que
l’Etat-nation, d’où le transfert aux Régions de larges pouvoirs de décisions.
La vision du Cameroun, sous la forme d’une nation en construction devient
dès lors passéiste et inutile. Bien plus, on voit se dégager une architecture
de l’Etat moderne en cercles concentriques ayant tous la même légitimité :
1. la Commune
2. le Canton
3. l’Etat Fédéré (Régions)
4. l’Etat Fédéral (Cameroun)
5. la Confédération Régionale (CEMAC ou CEEAC)
6. l’Union Africaine.
Chaque niveau représente un segment étatique avec ses missions, suivant le
principe de subsidiarité.
Dieudonné ESSOMBA