Plan Grand froid : à Paris, la prise en charge des migrants tourne au fiasco

Dans la nuit de mardi à mercredi, douze centimètres de mètres sont tombés dans Paris. Crédit : Reuters

Malgré la mise en place du Plan Grand froid lundi 5 février, les quelque 900 migrants qui vivent dans les rues de Paris n’ont pas pu trouver d’hébergement d’urgence dans la nuit de mardi à mercredi et n’ont eu d’autres choix que de dormir sous la neige.

Mercredi 7 février, Paris s’est réveillée sous un épais manteau neigeux. Douze centimètres de neige ont recouvert la capitale dans la nuit, du jamais-vu depuis 30 ans. Dès lundi 5 février, la préfecture de Paris a donc activé le Plan Grand froid et ouvert près de 675 places supplémentaires en hébergement d’urgence dans la région parisienne, dont 238 à Paris - en plus des 1 500 déjà ouvertes dans le cadre du dispositif hivernal et des 16 000 disponibles à l’année, précise un communiqué de la Mairie de Paris. Toute personne à la rue – sans domicile fixe, migrant…. – peut y prétendre.
Mais selon les ONG contactées par InfoMigrants, très peu de migrants ont pu en profiter. "Malgré les places annoncées, beaucoup de personnes ont dormi dans la rue", souffle Corinne Torre, chef de mission France chez Médecins sans frontières (MSF). "Sans les associations, les migrants seraient en grand danger". Pour l’instant, aucun cas d’hypothermie ou de gelure n’ont été constatés lors des maraudes de MSF mais le risque reste bien présent, d’autant que Météo France prévoit un nouvel épisode neigeux vendredi et les températures demeurent glaciales.
L’association d’aide aux migrants Utopia 56 s’inquiète elle aussi de la situation. "On sait que 600 places ont été ouvertes mais on ne sait pas où exactement donc on ne peut pas orienter les personnes convenablement", reconnait Yann Manzi, fondateur de l’association. "On manque cruellement d’informations".
Manque d’informations
Des équipes de MSF et d’Utopia 56 ont passé la soirée de mardi à essayer de joindre le 115, sans succès. Le numéro du Samu social était saturé dès la fin d‘après-midi.
Pour les ONG, les migrants semblent être complètement exclus du dispositif d’hébergement d’urgence mis en place par la Ville. La majorité des quelque 900 exilés qui dorment dans la capitale a dû passer la nuit sous des tentes, avec des couvertures fournies par les associations, malgré le froid glacial.
Même du côté de la Marie de Paris, on reconnait des dysfonctionnements. "Il y a sûrement un problème d’accès à l’information", confesse une source, qui préfère rester anonyme.
Une centaine de mise à l’abri
Pour pallier l’absence des pouvoirs publics, certaines associations ont mis les bouchées double. MSF a débloqué 30 places supplémentaires en urgence dans un hôtel du nord de Paris. Grâce à son réseau d’hébergement citoyen et à des places dans des hôtels, Utopia 56 a mis à l’abri environ 80 migrants. Emmaüs solidarité a ouvert la bulle du centre humanitaire La Chapelle permettant à 60 personnes de dormir au chaud. "Nous avons aussi accueilli 26 personnes, principalement des familles, dans un local d’accueil de jour", signale Bruno Morel, directeur général d'Emmaüs Solidarité.  
Reste que certains exilés refusent d’aller dans les centres d’hébergement. La faute à la circulaire Collomb qui prévoit de "trier" les migrants dans les structures d’hébergement d’urgence. "Ils ont peur. Ce que nous redoutions est en train d’arriver", explique Corinne Torre de MSF. Plusieurs associations s’étaient en effet insurgées en fin d’année contre la circulaire et avait dénoncé une logique "de recensement, d’étiquetage et de triage". Christian Reboul, chargé de la question des migrants à Médecins du Monde l’avait prédit… "Cette politique va accentuer la précarisation des migrants. Ils vont avoir peur de se rendre dans ces centres et vont donc être encore plus nombreux dans la rue".