Si aucun Africain ne fait partie des dix joueurs les mieux payés au
monde, ils sont des dizaines à
percevoir plus d’un million d’euros par
an, en Chine, au Moyen-Orient ou en Europe.
Tout en haut, il y a les hors-normes. Ces footballeurs qui émargent à
plusieurs dizaines de millions d’euros annuels. Avec ses 40 millions,
l’Argentin Lionel Messi du FC Barcelone est le recordman absolu. Pas
loin derrière lui, le Brésilien Neymar, qui joue au Paris-Saint-Germain,
en touche 35 et le Portugais Cristiano Ronaldo 31 à la Juventus de
Turin. Et ce n’est pas tout : ces salaires bruts annuels sont complétés
par des primes et des revenus publicitaires parfois supérieurs. Ainsi,
d’après les révélations des « Football Leaks », cette fuite massive de
documents provenant des instances du football mondial et des grands
clubs, Lionel Messi perçoit 104 millions d’euros de revenus annuels.
Les premiers joueurs africains, eux, sont un peu derrière. Le mieux payé du continent arrive 11e
au classement mondial. Il s’appelle Cédric Bakambu, est congolais
(République démocratique du Congo) et a choisi de jouer à Beijing Guoan
(Chine), où il perçoit un salaire annuel de 18 millions d’euros.
Le
championnat chinois est d’ailleurs l’un des plus rémunérateurs, et
plusieurs Africains y ont signé des contrats particulièrement juteux,
comme le Nigérian Odion Ighalo (Changchun Yatai) avec ses 10 millions,
son compatriote Obafemi Martins (Shanghai Shenhua, 5,5 millions) ou le
Camerounais Christian Bassogog (Henan Jianye FC), révélé lors de la
Coupe d’Afrique des nations de 2017, et dont le compte en banque se
remplit de 4,5 millions d’euros à chaque saison.
La Chine fait figure d’Eldorado
En
Asie, même si certains clubs ont parfois du mal à payer les salaires,
la Chine fait figure d’Eldorado. Un peu comme le Qatar, capable lui
aussi d’offrir des revenus très confortables. Ainsi, le Marocain Mehdi
Benatia va toucher environ 5 millions d’euros par an à Al-Duhail, soit
davantage qu’à la Juventus de Turin. Dans des proportions moindres, le
Tunisien Youssef Msakni gagne 200 000 euros par mois à Al-Duhail aussi,
qui l’a prêté jusqu’à la fin de la saison à Eupen (Belgique). Il y a
trois ans, ce même joueur avait refusé de venir à Lille, qui ne lui
offrait « que » 60 000 euros mensuels.
« Quand ils
vont en Chine, au Qatar ou aux Emirats arabes unis, les joueurs font
clairement un choix financier. Mais il ne faut pas perdre de vue que
beaucoup d’entre eux viennent de milieux modestes ou défavorisés. Un
contrat de trois ou quatre ans leur permet de mettre leur famille à
l’abri pour des générations. On sera toujours surpris quand c’est un
jeune joueur de 25 ans, mais, à leur place, beaucoup feraient la même
chose », cadre un agent de joueurs.
En
Europe, l’Africain le mieux payé est l’Egyptien Mohamed Salah
(Liverpool FC), avec ses 11,6 millions d’euros par an. Les Reds sont
d’ailleurs très généreux, puisque le Sénégalais Sadio Mané y touche
9 millions et le Guinéen Naby Keita 7,6 millions. D’autres footballeurs
africains profitent aussi des très confortables salaires proposés par
les clubs anglais, dont l’explosion des droits télé (2,3 milliards
d’euros par saison sur la période 2016-2019) a encore renforcé la
surface financière.
Ainsi, l’Algérien Riyad Mahrez a vu
son salaire doubler en passant de Leicester à Manchester City et gagne
905 000 euros par mois. Cela le situe sensiblement au même niveau que le
Gabonais Pierre-Emerick Aubamayang, à qui Arsenal offre 10 millions par
an. C’est un peu plus que pour les Ivoiriens Wilfried Zaha (Crystal
Palace, 6,7 millions), Serge Aurier (Tottehnam, 5 millions) ou Eric
Bailly (Manchester United, 4,4 millions), ou que le Nigérian Victor
Moses (Chelsea, 4,4 millions). Mohamed Elneny, le compatriote de Salah
et sous contrat avec Arsenal, doit, lui, se « contenter » de
3,2 millions.
« Des championnats sains financièrement »
En
Italie, certains joueurs africains de renommée internationale
perçoivent également de très bons salaires, surtout s’ils évoluent dans
de grands clubs. Ainsi, le Sénégalais Kalidou Koulibaly (Naples), gagne
3,5 millions par an, moitié moins que l’Ivoirien Gervinho (Parme), dont
le salaire annuel est estimé à 7 millions. Et au Milan AC, Franck Kessié
perçoit 2,2 millions, un peu moins que l’Algérien Faouzi Ghoulam à
Naples (2,4 millions).
Les
clubs allemands, dont la gestion financière est souvent citée en
exemple, savent se montrer plutôt généreux, sans proposer des salaires
comparables à ceux pratiqués en Premier League anglaise. Le Marocain
Amine Harit (Schalke 04) y gagne 1,4 million par an. Pas loin de là, aux
Pays-Bas, son compatriote Hakim Ziyech est le joueur le mieux payé de
l’Ajax d’Amsterdam. « Ce sont des championnats sains financièrement.
Les joueurs ont l’assurance d’être payés Ce n’est pas comme en Turquie,
où beaucoup de clubs, même les plus prestigieux, ont parfois des
retards dans le versement des salaires », poursuit l’agent.
Dans
ce pays, pourtant, beaucoup de joueurs africains gagnent très bien leur
vie, comme le Marocain Younès Belhanda (Galatasaray d’Istanbul,
3,4 millions), ou son coéquipier sénégalais Mbaye Diagne (2,7 millions).
Mais c’est à l’Algérien Sofiane Feghouli que la formation stambouliote
verse un des plus gros salaires annuels de l’effectif (3,9 millions).
Chez le voisin du Fenerbahce, Islam Slimani culmine même à 4,2 millions.
« Ils payent beaucoup d’impôts »
Et
puis vient la France. Le pays, qui recense le plus grand nombre de
joueurs africains, leur offre des salaires à la hauteur de ses voisins.
Le 8 février, le quotidien L’Equipe a révélé, comme tous les
ans, les salaires des joueurs de Ligue 1. Le Camerounais du
Paris-Saint-Germain Eric Choupo-Moting est l’Africain dont le salaire
annuel est le plus élevé (4 millions d’euros). Il arrive devant le
Burkinabé de Lyon Bertrand Traoré (3,5 millions), le Tunisien Aymen
Abdennour (3 millions), qui joue à Marseille, ou l’Ivoirien Maxwell
Cornet à Lyon, avec 2,2 millions. A Rennes, le Sénégalais Mbaye Niang
gagne 1,8 million par an, alors que Lille verse tous les mois
120 000 euros à l’Ivoirien Nicolas Pépé.
Dans
certains clubs, ce sont des joueurs africains qui touchent les plus
gros salaires de l’effectif. C’est le cas à Saint-Etienne avec le
Tunisien Wahbi Khazri (2,5 millions), à Toulouse avec l’Ivoirien
Max-Alain Gradel (2,3 millions), à Caen avec le Marocain Fayçal Fajr
(840 000 euros), à Dijon avec le Cap-Verdien Julio Tavares
(720 000 euros) ou à Reims avec le Togolais Alaixys Romao
(720 000 euros).
« C’est beaucoup d’argent, mais
c’est de l’argent privé, venant des droits télé, des recettes au stade,
des transferts ou de la vente de produits dérivés », observe un agent anonyme qui rappelle que « ces
joueurs sont des contribuables ». « Ils payent beaucoup d’impôts,
cotisent à hauteur de leurs revenus et, surtout, ils vivent en France,
donc consomment en France. Ils dépensent beaucoup d’argent, qui est
injecté dans l’économie. Quelqu’un qui gagne 100 000 ou 150 000 euros
par mois ne vit pas comme vous et moi, poursuit-il. Je
comprends qu’on puisse être choqué, mais derrière il y a des retombées
économiques dans les pays, que ce soit la France, l’Angleterre ou
l’Italie. »