
Géneve: Paul Biya est arrivé en toute discrétion dimanche à Cointrin. Mais ses opposants l’ont
repéré.
Le président du Cameroun est à Genève. Paul Biya est arrivé
dimanche soir à bord d’un avion qu’il utilise très rarement (loué à une société
privée), qui a utilisé un indicatif radio («call sign») inhabituel et qui était
invisible sur les radars accessibles au grand public, selon une source
aéroportuaire.
L’homme fort de cet État d’Afrique centrale aurait souhaité
venir en toute discrétion car ses séjours réguliers dans le canton suscitent
une vive émotion au Cameroun. De nombreux compatriotes estiment que Paul Biya,
au pouvoir depuis 1982, se repose trop souvent en Suisse, alors qu’il devrait
s’occuper des affaires de son pays.
Ses allées et venues à Genève sont depuis quelques années
suivies sur les sites de tracking d’avions avant d’être relayés par la
communauté camerounaise sur les réseaux sociaux où ils déclenchent une cascade
de réactions. Ces dernières années, ses séjours en Suisse se sont accompagnés
de manifestations devant l’hôtel Intercontinental, où il séjourne en général.
Si ces rassemblements ne sont pas toujours faciles à
contrôler pour les autorités genevoises, ils manquent aussi parfois de
cohérence: des ressortissants camerounais ont ainsi pu, dans le passé,
manifester leur colère devant une maison privée au bord du lac, estimant à tort
que le président y séjournait.
Cette fois, la diaspora croit savoir que le président de 86
ans, malade, serait en Suisse pour se faire soigner. Certains regrettent
d’ailleurs que la Confédération accueille cette personnalité jugée autoritaire,
alors que la Suisse joue un rôle de médiation dans le conflit civil qui a lieu
entre une partie de la communauté anglophone, indépendantiste, et le
gouvernement de Yaoundé.
En avril, le président avait déjà eu l’intention de venir en
Suisse, pour un séjour hospitalier dans une clinique privée à Lausanne. Selon
un document, Paul Biya souhaitait venir avec un corps de onze soldats armés.
L’homme d’État ne serait finalement pas venu, mais sa femme, Chantal Biya, si.
Selon une enquête du consortium d’investigation OCCRP («Organized
crime and corruption reporting project») publiée en février 2018, en 35 ans de
pouvoir, Paul Biya a passé quatre ans et demi en «brève visite privée» en
Europe, presque toujours à l’hôtel Intercontinental. Dans ce palace, une nuitée
de Paul Biya et de son entourage coûterait 40 000 dollars, selon les calculs
des journalistes. (TDG)
Source: tdg.ch