Après deux mois de calme relatif, les revendications sécessionnistes
ont repris à Bamenda et dans les
villages de la région du Nord-Ouest du
Cameroun. Les populations, elles, réclament la fin des hostilités.
Un gendarme a été abattu ce jeudi 26 janvier dans la ville de Kumbo,
une localité située dans le département de Bui (région du Nord-Ouest).
Selon des sources locales, la victime, l’adjudant-chef Ngando Robert,
était en fonction dans un poste lorsqu’il a été attaqué.
Selon ces mêmes sources, cette action serait l’œuvre de la
Banso Resistance Army (BRA), un groupe d’individus se réclamant d’une
faction radicale des sécessionnistes. « C’est actuellement le groupe le
plus actif de la zone. Ils ont répandu leurs tracts dans la ville »,
affirme une habitante de Kumbo.
C’est devenu fréquent. Des bruits d’armes et d’explosifs partout. On peut mourir à tout moment
Tout au long de la semaine, ces militants auraient proféré
des menaces contre quiconque s’aviserait de participer à la fête
nationale de la jeunesse. Cette célébration, instituée par le président
Ahmadou Ahidjo en 1966, coïncide avec l’anniversaire du référendum du 11
février 1961, qui permit au Southern Cameroons de rejoindre la
République du Cameroun.
Regain de violences
Il s’agit du second meurtre d’un gendarme dans le Nord-Ouest
en une semaine, signe du retour des violences dans la région. Le 19
janvier, déjà, des individus armés non identifiés ont tenté de prendre
d’assaut à Mbengwi une base du Bataillon d’intervention rapide (Bir) de
l’armée camerounaise, avant d’être repérés par une sentinelle. De
violents affrontements ont ensuite éclaté entre les forces de défense
camerounaises et ces assaillants, qui auraient tous été neutralisés,
selon le Colonel Didier Badjeck, porte-parole de l’armée, joint par Jeune Afrique.
Le même jour, le bloc administratif du lycée de Balikumbat a
été réduit en cendres, et une tentative d’incendie du collège
Catholique Sainte Rita a été avortée. Les auteurs de cet acte ont
finalement réussi leur action dans la nuit du 23 janvier, enflammant
entièrement le dortoir des filles.
Dans la localité de Fundong, des individus, empêchés par les
forces de sécurité, ont également tenté de brûler un commissariat. À
Bamenda, les résidents affirment avoir entendu des échanges de coups de
feu, au moins une fois au cours de cette semaine.
Les « ghost town » sont une obligation et ils doivent être respectés religieusement
« C’est devenu fréquent. Des bruits d’armes et d’explosifs
partout. On peut mourir à tout moment. Nous ne laissons plus nos enfants
sortir », confie Bernadette, une habitante de la ville de Kumbo. « Nous
vivons dans la peur car nous ne savons pas ce qui peut arriver et à
quel moment », ajoute Delphine Gaah, une commerçante de Bamenda.
Face à la montée des tensions, des renforts sécuritaires ont
été déployés dans les quartiers et les rues de Bamenda, afin d’appuyer
les troupes déjà sur place. Ils espèrent prévenir tout débordement
menant à une escalade des actes de violence et de vandalisme dans la
région.
Respect timide des ghost town
La région du Nord-Ouest n’avait pas connu pareilles
violences depuis le mois de novembre 2016. Un soldat y avait été tué
alors que son escadron intervenait pour protéger le lycée technique de
Jakiri, envahi par des manifestants. Deux jours plus tard, des
affrontements entre sécessionnistes et forces de défense à l’entrée de
Bamenda entraînaient la mort de deux autres gendarmes et d’au moins un
civil.
Depuis, si la situation n’était pas revenue à la normale, les échanges armés se faisaient rares. Après l’arrestation des leaders de la contestation anglophone au Nigeria, les habitants de cette région avait timidement respecté le mot d’ordre de « ghost town » imposé par les sécessionnistes.
On ne négocie pas avec ceux qui veulent amputer une partie de notre territoire pour construire une hypothétique République
Une défiance que dénoncent les membres de la Banso
Resistance army dans ses tracts. « Les « ghost town » sont une
obligation et ils doivent être respectés religieusement », écrivent-ils.
Ils promettent par ailleurs qu’ils veilleront à ce qu’il en soit ainsi
dès le lundi 29 janvier prochain.
Pour le ministre de la Communication Issa Tchiroma Bakary,
le gouvernement camerounais n’a pas l’intention de dialoguer avec ces
branches sécessionnistes radicales. « On ne négocie pas avec ceux qui
veulent amputer une partie de notre territoire pour construire une
hypothétique République ».
Source: Jeune Afrique