L’hebdomadaire généraliste Nouvel Horizon met la clé sous la porte
ce vendredi après une aventure
journalistique d’une vingtaine d’années.
Une disparition symptomatique d’une presse sénégalaise dont le modèle
économique n’est plus viable.
L’annonce de la cessation des parutions de l’hebdomadaire
Nouvel Horizon a sonné comme un coup de tonnerre dans le ciel déjà
sombre de la presse sénégalaise. Et pour cause. Ce magazine, lancé en
1996 à Dakar est parvenu, en une vingtaine d’années, à se tailler une
place respectable au sein du paysage médiatique sénégalais. Informé,
bien écrit, Nouvel Horizon pouvait souvent être autant équilibré
qu’impertinent dans ses prises de position.
Alors que l’hebdo du quartier dakarois de la Sicap Liberté
III ne paraîtra plus, son numéro 1053, qui devait paraître ce vendredi 5
janvier pour signer la fin de l’aventure n’a finalement pas été aperçu
en kiosque. « Je ne sais pas ce qui s’est passé au niveau de
l’imprimeur. De toute façon, il n’y a plus urgence », lâche Issa Sall,
le directeur de publication, au travers d’un sourire philosophique, au
bout du fil…
On voyait tous venir cette décision d’arrêter, on n’en connaissait simplement pas l’échéance
Fondé par un groupe de passionnés de l’écriture et de
l’actualité – parmi lesquels Abdoulaye Bamba Diallo, membre fondateur du
journal satirique Le cafard libéré, qui en était le président, et Issa
Sall, le directeur de publication –, le journal accordait une place de
choix à l’information politique, tout en traitant l’actualité
économique, culturelle, sociale et internationale. Ses colonnes
accueillaient très souvent intellectuels comme éditorialistes réputés.
Le premier numéro de l’hebdomadaire, paru le 26 janvier 1996, titrait sur Ousmane Tanor Dieng, alors tout-puissant patron du Parti socialiste sénégalais, durant la présidence d’Abdou Diouf.
Un environnement économique particulièrement difficile
« La réalité économique générale ainsi que
la conjoncture médiatique sont aujourd’hui vraiment très différentes de
ce que l’on pouvait trouver il y a dix ans », explique Issa Sall. Nouvel
Horizon fait aujourd’hui les frais d’un environnement économique
particulièrement difficile pour l’ensemble de la presse écrite locale.
Une situation notamment liée à la rude
concurrence imposée par le numérique et les médias audiovisuels, dans un
pays où plus de 50 % de la population est illettrée. Mais de manière
plus générale, aucun pan de la presse sénégalaise n’échappe à cette
crise structurelle du secteur.
Ouverts à « de nouvelles perspectives »
« De toute façon, on voyait tous venir
cette décision d’arrêter, on n’en connaissait simplement pas l’échéance
», commente un membre de la rédaction, réduite ces derniers mois à une
quinzaine de journalistes, contre trente-cinq en temps normal.
Le journal affichait un chiffre d’affaires
d’environ 800 millions de FCFA et tirait à un peu moins de 10 000
exemplaires par semaine. Le nouveau Code de la presse sénégalais,
adopté le 20 juin 2017 par la représentation nationale, dont certaines
innovations économiques sont censées faire émerger de véritables
entreprises médiatiques viables, attend toujours son entrée en vigueur.
L’aventure Nouvel Horizon est-elle bien
finie ? Oui, en tout cas, dans son format actuel, selon son directeur de
publication Issa Sall, qui ne ferme cependant pas la porte à « de
nouvelles perspectives ».
Par Amadou Oury Diallo - à Dakar
Source: Jeune Afrique