La justice nigériane a libéré 475 nouveaux membres présumés de Boko
Haram au terme de procès de
masse où la majorité des personnes inculpées
n'ont pu être condamnées faute de preuves suffisantes, a annoncé
dimanche le ministère de la Justice.
Des centaines de membres présumés du groupe jihadiste
nigérian ont comparu cette semaine devant un tribunal installé dans une
base militaire à Kainji, une ville reculée de l’État du Niger, dans le
centre du Nigeria.
1 699 personnes à la barre
Au total, 1 669 personnes étaient présentées à la barre à
l’ouverture des audiences qui avaient démarré en octobre. Un premier
groupe de 468 avaient alors été libéré au bout de quelques jours.
Un total de 45 avaient été condamnés à des peines allant de
deux à 15 ans de prison et 28 cas avaient été renvoyés vers d’autres
juridictions.
Un groupe de 82 d’entre eux avaient plaidé coupable en
échange d’un assouplissement de peine, certains étant relâchés après des
années déjà passées en détention. Les autres dossiers avaient été
renvoyés à une nouvelle audience.
« L’absence de preuves suffisantes »
Un total de 475 membres présumés du groupe jihadiste, qui
mène depuis 2009 une insurrection sanglante dans le nord-est du Nigeria
ayant fait plus de 20 000 morts, n’ont finalement fait l’objet d’aucune
poursuite « en l’absence de preuves suffisantes contre eux » et « ont
été libérés », a déclaré le porte-parole du ministre de la Justice,
Salihu Othman Isah.
Les personnes libérées seront prises en charge dans leurs États d’origine pour une « réhabilitation appropriée », a-t-il ajouté.
Le tribunal a aussi ordonné à ces États de leur fournir
« une réhabilitation dans un centre approprié » avant qu’ils ne
retrouvent leurs familles. « Les personnes atteintes de troubles mentaux
ou avec des problèmes de santé doivent également recevoir des soins
médicaux appropriés », a-t-il dit.
Des profils variés
Une des prévenues libérées, Lubabatu Yakubu, avait par
exemple été arrêtée en 2014 à Numan, dans l’État d’Adamawa, dans le
nord-est, deux jours après son mariage avec un combattant, qui l’avait
aussitôt répudiée, puis accusée de complicité avec Boko Haram.
Une autre femme, mère d’un nourrisson de trois mois, Mariam
Mohammed, avait été emmenée dans la forêt de Sambisa (fief du groupe
dans l’Etat de Borno) et mariée à onze ans. Elle avait été arrêtée par
des soldats en 2014 alors qu’elle tentait de s’échapper.
Par ailleurs, un jihadiste condamné en début de semaine à 15
ans de prison pour avoir participé à l’enlèvement par Boko Haram de
plus de 200 lycéennes à Chibok, dans l’État de Borno, a été condamné vendredi à 15 ans de prison supplémentaires.
Le cerveau de l’enlèvement des lycéennes
Les peines étant cumulatives, Haruna Yahaya, 35 ans, jugé
coupable d’être le cerveau de l’enlèvement, « devra passer 30 ans en
prison », selon le porte-parole du ministère de la Justice.
Il est le premier combattant a être jugé pour l’enlèvement
des 219 lycéennes, âgées de 12 à 17 ans, en avril 2014 alors qu’elles
passaient leurs examens, un rapt qui avait soulevé une indignation
mondiale.
La majorité des procès, les premiers du genre au Nigeria, se
sont déroulées à huis-clos, entraînant les critiques des organisations
de défense des droits de l’homme.
Multiplication des attaques
Le gouvernement nigérian ne cesse de répéter que le conflit
contre Boko Haram a pris fin, malgré la multiplication des attaques sur
les villages ou d’attentats-suicides dans l’État du Borno (nord-est),
épicentre des violences.
L’armée avait notamment affirmé en début de semaine que le leader de Boko Haram, Abubakar Shekau, « avait pris les jambes à sou cou », déguisé en femme pour éviter d’être repéré, après une opération militaire.
Vendredi, un triple attentat-suicide a fait au moins 19 morts et 70 blessés sur un marché aux poissons de Konduga, à une trentaine de km de Maiduguri, la capitale du Borno.
Source: Jeune Afrique