Le général Gilbert Diendéré, l'un des cerveaux
présumés du coup d'État manqué de 2015 au Burkina
Faso, a été mis en
cause par l’un de ses co-accusés pour la première fois depuis
l'ouverture du procès.
Le général Diendéré « a instruit de faire le coup d’État », a déclaré mardi à la barre l’adjudant Jean-Florent Nion, quatrième accusé à témoigner dans ce procès historique.
Le 16 septembre 2015, des soldats du régiment de sécurité
présidentielle (RSP) avaient tenté, en vain, de renverser le
gouvernement de transition mis en place après la chute du président Blaise Compaoré, chassé en octobre 2014 par la rue après 27 ans au pouvoir. Le général Diendéré avait expliqué lors de l’instruction avoir « dû assumer le putsch perpétré par un groupe d’éléments » de l’ex-RSP, selon le parquet militaire. Il est le principal accusé du procès avec le général Djibril Bassolé, ancien ministre des Affaires étrangères du régime Compaoré.
« Le 16 septembre (2015), j’étais dans la salle de repos lorsque j’ai
été réveillé par l’adjudant chef Eloi Badiel et le sergent chef
Koussoubé Roger, qui m’ont informé que le général Diendéré a instruit de
faire un coup d’État ce jour. Face à la gravité de l’information j’ai
demandé à voir directement le général », a déclaré à la barre l’adjudant
Nion, premier accusé à mettre directement en cause l’ancien chef
d’état-major particulier du président Compaoré.
« Je me suis rendu au domicile du général Diendéré, à qui j’ai exposé
les faits. En retour, le général a demandé si ce n’était pas encore
fait. Je me suis rendu compte qu’il était au courant et je suis reparti
au palais [présidentiel] ».
Quelques heures plus tard, l’adjudant Nion embarquera dans un
véhicule avec plusieurs militaires et ils feront irruption dans la salle
du conseil des ministres, ordonnant au président du régime de
transition, à son premier ministre et à deux autres membres du
gouvernement de les suivre.
« J’étais au mauvais endroit au mauvais moment. »
Accusé d' »attentat à la sûreté de l’État », de « meurtres et coups
et blessures volontaires » et d »incitation à désobéir à la discipline
militaire », l’adjudant Nion a dit « reconnaitre partiellement les
faits » qui lui sont reprochés.
Pour sa défense, il a expliqué avoir « été embarqué dans une
situation dont [il] ne pouvai[t] sortir, au risque de représailles ».
« J’étais au mauvais endroit au mauvais moment. Si je n’étais pas de
garde le jour des faits, je ne serais peut-être pas devant cette
barre », s’est-il défendu.
« Nous avons choisi dès le départ de dire la vérité. Il ne s’agit pas
d’une stratégie de défense, on raconte ce qui s’est passé et c’est au
tribunal de trancher en tenant compte de cela. Ce n’est qu’en disant la
vérité qu’on se défend le mieux », a indiqué son avocat, Me Adrien Nion.
« Il n’est pas évident pour un élément de l’ex RSP de venir dire
devant la barre des choses claires et nettes, la vérité contre ses
anciens camarades. C’est un courage qu’il faut louer », a estimé Me Ambroise Farama, un avocat des parties civiles.
Source: Jeune Afrique