
Des centaines de personnes ont manifesté en Algérie dans la nuit de
dimanche à lundi pour protester
contre la candidature, déposée plus tôt, d'Abdelaziz Bouteflika à l'élection présidentielle pour un 5e mandat qu'il s'est engagé à abréger.
contre la candidature, déposée plus tôt, d'Abdelaziz Bouteflika à l'élection présidentielle pour un 5e mandat qu'il s'est engagé à abréger.
Le message n'a apparemment pas convaincu : de nouvelles marches
nocturnes se sont déroulées dans le centre d'Alger, survolé par un
hélicoptère, où plusieurs centaines de jeunes défilaient dans le calme,
et dans d'autres villes.
Un important dispositif policier s'est progressivement déployé dans
le centre-ville de la capitale, alors qu'aucun policier n'était visible
au début des marches dans ce quartier.
Quelques heures plus tôt, dimanche en fin d'après-midi, c'est le
directeur de campagne de M. Bouteflika, Abdelghani Zaalane, qui s'est
chargé de déposer au Conseil constitutionnel à Alger le dossier du
président algérien, hospitalisé il y a une semaine en Suisse et dont le
retour n'a toujours pas été annoncé.
M. Zaalane a ensuite donné lecture devant la presse d'une lettre du
candidat Bouteflika, dont de larges extraits avaient été auparavant
diffusés à la télévision.
"J'ai écouté et entendu le cri du coeur des manifestants et en
particulier des milliers de jeunes qui m'ont interpellé sur l'avenir de
notre patrie", y assure M. Bouteflika, qui ne s'est pas adressé de vive
voix aux Algériens depuis un AVC en 2013 et qui n'apparaît plus que
rarement en public.
Les Algériens ont manifesté massivement ces dix derniers jours à
Alger et dans le reste du pays contre la perspective d'un 5e mandat du
chef de l'Etat âgé de 82 ans, élu pour la première fois en 1999 et réélu
depuis sans discontinuer et toujours avec plus de 80% des voix au 1er
tour.
"J'ai le devoir et la volonté d'apaiser les coeurs et les esprits de
mes compatriotes" et de répondre à "leur exigence fondamentale (...) le
changement du système", poursuit le président algérien qui prend
"l'engagement", s'il est réélu, d'organiser "une élection présidentielle
anticipée" à laquelle il ne sera pas candidat.
La date de cette élection sera fixée par une "conférence nationale"
mise en place après le scrutin et chargée de préparer des "réformes
politiques, institutionnelles, économiques et sociales" devant déboucher
sur un "nouveau système".
Cette élection anticipée "assurera ma succession dans des conditions
incontestables de sérénité, de liberté et de transparence", affirme M.
Bouteflika qui annonce aussi la rédaction d'une nouvelle Constitution,
consacrant "la naissance d'une nouvelle République" et qui sera soumise à
référendum.
- Contestation inédite -
Le directeur de campagne de M. Bouteflika a déclaré que sa
candidature à la présidentielle du 18 avril avait recueilli le
parrainage de 19.700 élus nationaux et locaux ainsi que de 5,86 millions
d'électeurs.
Arrivés dans plusieurs fourgons, les formulaires correspondants ont été déposés dimanche soir au Conseil constitutionnel.
Cet engagement du chef de l'Etat à n'exercer qu'un mandat abrégé vise
à désamorcer une contestation inédite de son pouvoir, sans pour autant
reculer face à la rue qui réclame en premier lieu l'abandon de sa
candidature.
Dans la journée, des centaines d'étudiants ont à nouveau protesté,
sans incidents, dans la rue et sur les campus, à Alger et dans plusieurs
autres villes, scandant "Non au 5e mandat !", 48 heures après des
manifestations monstres en Algérie.
"Bouteflika, dégage!", "Algérie libre et démocratique !", ont martelé
les protestataires dans la capitale, beaucoup d'automobilistes
klaxonnant au passage en signe de solidarité.
L'important déploiement des forces de l'ordre autour du Conseil
constitutionnel n'a pas empêché un cortège d'étudiants de tenter
d'accéder à ses abords.
A Annaba (nord-est), plusieurs centaines d'étudiants ont manifesté
sur les campus et dans la rue, a raconté à l'AFP un journaliste local,
comme à Tiaret et à Biskra.
Le site d'informations internet TSA a signalé des rassemblements
estudiantins de plus ou moins grande ampleur à Oran et à Constantine,
les 2e et 3e villes du pays, à Bouira, Skikda, Mostaganem et Guelma.
Des milliers de manifestants se sont également rassemblés dimanche en France.
- Huit candidats -
M. Bouteflika est le 8e candidat à avoir déposé son dossier au
Conseil constitutionnel, qui doit statuer sous dix jours sur la validité
des candidatures. Le président ne devrait faire face à un aucun
candidat susceptible de menacer sa réélection.
Principal adversaire de M. Bouteflika aux présidentielles de 2004 et
2014, son ancien Premier ministre Ali Benflis a en effet annoncé
dimanche renoncer à se présenter à une présidentielle qui n'a plus "lieu
d'être" en raison de la contestation.
Abderrazak Makri, le chef du Mouvement de la société pour la paix
(MSP), le principal parti islamiste qui a rompu en 2012 avec l'alliance
présidentielle, a confirmé dimanche à l'AFP qu'il ne se présenterait pas
puisque M. Bouteflika est candidat.
Le général à la retraite Ali Ghediri, qui a débarqué sur la scène
politique fin 2018 en promettant "le changement", a remis son dossier
dimanche. Sans parti, il est difficile d'évaluer sa réelle popularité.
Cinq autres petits candidats avaient auparavant déposé leur dossier.
Le plus connu est Abdelaziz Belaïd, 55 ans : transfuge du Front de
libération nationale (FLN, formation de M. Bouteflika) qui a créé en
2012 le Front Al-Moustakbel, il a recueilli 3% des voix à la
présidentielle de 2014.
L'homme d'affaires Rachid Nekkaz, omniprésent sur les réseaux sociaux
et qui draine des foules de jeunes enthousiastes, semble pour sa part
ne pas remplir les conditions d'éligibilité.
VOA Avec AFP