Insatisfait de la « lenteur » des négociations avec la Chine, le
président américain a annoncé que les
taxes sur 200 milliards de
produits chinois seraient relevés de 10 % à 25 %, et menace de taxer
325 milliards d’importations de plus.
Ultime coup de bluff ou prémices d’un constat d’échec ? Alors que pas
moins d’une centaine de responsables chinois étaient attendus, mercredi
8 mai à Washington, pour une séance de négociations commerciales qui
aurait pu être la dernière, Donald Trump a bouleversé la donne dimanche 5
mai. A la surprise générale, le président américain a annoncé qu’il
s’apprêtait, dès vendredi 10 mai, à relever de 10 % à 25 % les droits de
douane sur 250 milliards de dollars (223 milliards d’euros) de produits
chinois importés. Jusqu’à présent, « seuls » 50 milliards de produits
high-tech chinois étaient taxés à 25 %, et 200 milliards d’autres
produits à 10 %. Par ailleurs, « 325 milliards de dollars de biens
que nous expédie la Chine restent non taxés mais le seront rapidement, à
un taux de 25 % », a précisé l’hôte de la Maison Blanche. Le même
président qui, depuis janvier, a estimé à plusieurs reprises que les
négociations étaient sur le point d’aboutir, juge désormais que les
discussions se poursuivaient « mais trop lentement, parce qu’ils cherchent à renégocier ». « Non ! », a-t-il ajouté.
Lundi,
les marchés boursiers étaient tous orientés à la baisse, chacun
attendant la réaction chinoise. Les Chinois important nettement moins de
produits américains que l’inverse, ils ne peuvent pas appliquer des
mesures de rétorsion comparables. En l’absence de réaction officielle,
certains à Pékin, affirmaient lundi en milieu de journée que Liu He, le
vice-premier ministre chargé des négociations ne se rendrait pas,
mercredi, à Washington. D’autres, qu’il n’y ferait qu’un séjour écourté.
Moins mauvais qu’attendu
Si,
depuis plusieurs mois, les Chinois ont accepté le principe d’augmenter
leurs achats de certains produits notamment agricoles en provenance des
Etats-Unis et d’ouvrir davantage le marché des services financiers à la
concurrence occidentale, les négociations semblent buter sur deux points
majeurs. Les Chinois rechignent à moins subventionner leurs entreprises
publiques. Surtout, les deux parties n’arrivent pas à se mettre
d’accord sur le mécanisme de vérification de la mise en œuvre du futur
accord et sur les sanctions qui découleraient de sa non-application. Des
points d’autant plus délicats qu’une partie de l’accord devrait
concerner le respect par les Chinois des sujets complexes comme les
règles de la propriété intellectuelle et des transferts de technologies.
Paradoxalement,
la conjoncture économique ne plaide pas forcément en faveur d’un accord
rapide. Aux Etats-Unis, les bons chiffres de la croissance et de
l’emploi semblent indiquer que la guerre commerciale n’a pas eu les
effets négatifs annoncés par certains économistes. Et si, en Chine, la
croissance – officiellement comprise entre 6 % et 6,5 % cette année –
n’a jamais été aussi basse depuis plus de vingt ans, ce ralentissement
ne semble pas particulièrement dû aux exportations vers les Etats-Unis
qui restent très élevées. Par ailleurs, les chiffres officiels du
premier trimestre sont plutôt moins mauvais qu’attendu. Les Chinois
peuvent être tentés de miser, à tort ou à raison, sur le fait qu’après
avoir échoué dans sa négociation avec le leader nord-coréen Kim Jong-un,
Donald Trump ne peut pas se permettre un second échec sur la scène
internationale.