Coronavirus et quarantaine en Italie : comment 52 000 personnes sont confinées chez elles

Le Parisien 
L’Italie est le premier pays d’Europe à instaurer des mises en quarantaine de villes, en isolant
onze communes. L’armée pourra être chargée de veiller au confinement.
Une première en Europe. L’Italie a annoncé samedi la mise en isolement pour environ deux semaines d’une dizaine de communes du nord de l’Italie, après la découverte de 76 cas de contamination au nouveau coronavirus en deux jours, et deux décès, les premiers d’Européens sur le continent.
Environ 52 000 personnes se réveillent ce dimanche matin dans des zones où « ni l’entrée ni la sortie ne seront autorisées sauf dérogation particulière », comme l’a annoncé le Premier ministre italien Giuseppe Conte. Le point sur la situation.

Où sont les foyers ?

Le foyer principal se trouve à Codogno, à 60 km au sud de Milan. Dans cette ville et neuf localités voisines, tous les lieux publics (bars, mairies, bibliothèques, écoles) sauf les pharmacies sont fermés depuis vendredi soir.
L’autre zone est le village de Vo' Euganeo où a été annoncé vendredi soir le premier décès d’un Italien (et Européen), un maçon de 78 ans nommé Adriano Trevisan. Le deuxième décès, d’une femme du même âge, s’est produit près de Codogno dans la nuit.

Quelles mesures ont été prises ?

L’Italie a été le premier pays d’Europe à instaurer des mises en quarantaine de villes en isolant onze communes : ni l’entrée ni la sortie de ces zones ne sont autorisées, sauf dérogation. Le Premier ministre italien a aussi annoncé la fermeture des entreprises et des établissements scolaires de ces zones ainsi que l’annulation des événements publics (carnavals, compétitions sportives, sorties scolaires, etc.).
Selon Giuseppe Conte, les mesures d’isolement concerneront environ 52 000 personnes dont 47 000 près de Codogno, « mais les personnes pourront circuler à l’intérieur de ces zones ». Au besoin, pour surveiller les points de contrôle, Giuseppe Conte a dit qu’il enverrait l’armée. Le décret-loi prévoit des sanctions pouvant aller jusqu’à trois mois de réclusion.
Trois matchs de championnat de Serie A prévus ce dimanche ont été reportés : Inter-Sampdoria, Atalanta-Sassuolo et Vérone-Cagliari. Ils devaient se dérouler dans les deux régions les plus touchées : la Lombardie (autour de Milan) et la Vénétie (autour de Venise). Les universités de ces deux grandes régions seront fermées par précaution.

Comment se déroule l’isolement ?

Dans l'« épicentre du foyer », Codogno - 15 000 habitants - des journalistes ont vu des rues désertes pour un samedi soir. « Nous avons tous peur, mais on croise les doigts, nous espérons que tout ira bien », dit Rosa, une pharmacienne, en disant craindre « des problèmes de ravitaillement dans les prochains jours ».
Coronavirus : des rues désertées dans le nord de l’Italie
Les trains de la société privée Trenord ne s’arrêtent plus dans les gares de Codogno et deux villes voisines, habitées par beaucoup de personnes travaillant dans la métropole de Milan, capitale économique italienne. À Codogno, des panneaux lumineux annoncent : « Coronavirus, la population est invitée à rester chez elle, par mesure de précaution ».
Des pancartes ont été placées sur les écoles, les églises, les salles de sport, les bibliothèques, les bars, restaurants et discothèques. Erika, serveuse dans un restaurant qui a fermé pour 15 jours, avoue avoir « un peu peur car on peut tous être contaminés ». « Nous achetons des provisions de nourriture car on ne sait pas si les supermarchés resteront ouverts », ajoute-t-elle, en soulignant que la famille a acheté des boissons « pour passer une soirée tranquille » mais « tous enfermés à la maison ».
En Vénétie, sous le choc d’avoir enregistré le premier mort italien, les autorités ont soumis à des tests des ressortissants chinois qui fréquentaient le bar de Vo' Euganeo, comme le maçon Adriano Trevisan.

Combien de cas ?

Le chef de la protection civile, Angelo Borelli, a annoncé un total de 79 malades à ce jour, dans lesquels il a inclu trois contaminations connues depuis des semaines, contractées hors d’Italie. Les nouveaux cas sont au nombre de 76, dont 54 pour la seule Lombardie et 17 en Vénétie. Trois autres, deux en Émilie-Romagne et un dans le Piémont, dérivent apparemment du foyer de Codogno. Sur le total de personnes testées positivement, 13 sont en thérapie intensive, 33 hospitalisées avec des symptômes et 11 simplement en isolement à domicile.
Selon les autorités de Lombardie, le foyer de cette région a pour origine Mattia, un chercheur de 38 ans, « le patient 1 », hospitalisé en soins intensifs depuis mercredi à Codogno et transféré samedi à Pavie. Sa maladie est un mystère car il est exclu qu’il ait été contaminé par l’un de ses amis revenu de Chine en janvier. « Sur la base des tests effectués, [l’ami] n’a pas développé les anticorps », a indiqué le ministre adjoint de la Santé, Pierpaolo Sileri.
Très sportif, ce cadre de la multinationale américaine Unilever, a participé à plusieurs marathons début février. Un total de 120 salariés du siège local sur 160 ont été testés. Involontairement, il a contaminé sa femme enceinte de 8 mois, un ami avec lequel il jouait au foot et trois habitués d’un bar local. Les autres cas du foyer sont des médecins, des aides-soignants, et des patients de l’hôpital de Codogno qui ont infecté leur entourage.

Et à Milan ?

Malgré des craintes, les défilés de la Fashion week milanaise se sont poursuivis « tranquillement, sans panique », a indiqué le président de la Chambre de la mode, Carlo Capasa. Le désigner Giorgio Armani a toutefois annoncé samedi soir qu’il fera défiler ses mannequins à portes closes dimanche avec retransmission en streaming sur son site « pour ne pas mettre à risque la santé des participants ».
Par Le Parisien avec AFP