Le garde des Sceaux veut voir les procureurs nommés, comme les
juges, sur « avis conforme »
du Conseil supérieur de la magistrature
FEUILLE DE ROUTE - Le garde des Sceaux veut voir les procureurs
nommés, comme les juges, sur « avis conforme » du Conseil supérieur de
la magistrature
On en sait un peu plus sur la feuille de route d’Eric Dupond-Moretti.
Ni « laxiste », ni « ultra-répressif » : c’est en effet la vision de la
justice que dévoile le garde des Sceaux dans un entretien ce dimanche
au JDD.
Lutter contre les violences conjugales
Le nouveau
ministre dessine quelques priorités allant de la lutte contre les
violences conjugales à la fermeté face au terrorisme en passant par des
réformes du parquet et de la justice
des mineurs. En 600 jours, il ne pourra pas tout faire, alors il ira
« à l’instinct », avec « des idées » et la conscience d’un homme qui
« doit tout à la République » : « Comme avocat, j’ai toujours défendu
des hommes, pas des causes. Cette fois encore, j’y suis allé pour
l’homme », dit-il pour expliquer pourquoi il a troqué à 59 ans la robe
d’avocat pour la cravate du ministre.
Les précisions sur ses
objectifs étaient attendues, pour celui dont l’arrivée place Vendôme a
suscité autant de surprise que d’inquiétude voire de défiance au sein de
la magistrature et parmi les associations féministes, échaudées par ses
critiques du mouvement #MeToo.
D’emblée il démine : « Je veux que les hommes suspectés de violences
conjugales, s’ils ne sont pas déférés, soient convoqués par le procureur
et reçoivent un avertissement judiciaire solennel ». « Il ne s’agit pas
d’une condamnation ; c’est le moyen de montrer à un homme que la
justice est attentive et qu’elle ne laisse rien passer », assène-t-il.
Sa « réflexion a évolué » sur le terrorisme
Sur
le terrorisme, alors que le Sénat va bientôt examiner un texte
controversé prévoyant des « mesures de sûreté » pour les condamnés à
l’issue de leur peine, il confesse que sa « réflexion a évolué ». « J’ai
toujours été opposé à la rétention de sûreté telle que l’envisageait le
président Sarkozy, parce qu’elle envoyait en prison des individus non
pour ce qu’ils avaient fait mais pour ce qu’ils seraient susceptibles de
faire dans l’avenir », explique-t-il. Mais il se dit « totalement
favorable » à l’imposition du port du bracelet électronique « pour des
gens qui ont été condamnés pour des faits de terrorisme ».
S’il
est toujours en faveur du rapatriement des femmes et des enfants retenus
en Syrie, il se retranche derrière sa loyauté à un gouvernement qui
« défend l’idée que ces prisonniers doivent être jugés là où ils ont
commis leurs actes et qui examine au cas par cas la situation des
mineurs pour leur rapatriement ».
Les réformes qui lui tiennent à
cœur et qu’il s’engage à mener restent celles du parquet – il veut voir
les procureurs nommés, comme les juges, sur « avis conforme » du
Conseil supérieur de la magistrature (CSM) : « je veux graver cette
règle dans le marbre de la Constitution » – et de la justice des
mineurs qu’il veut « plus rapide et plus efficace ». Sans promettre de
révolution, il rappelle que « la justice est au service du justiciable,
non l’inverse ». « Droit-de-l’hommiste » assumé, il entend aussi
améliorer le quotidien des détenus et propose de généraliser l’existence
de « délégués qui, parmi les prisonniers, signalent les difficultés,
les carences ».
Oui aux remontées d’informations
Comme
ministre, il s’interdira « toute intervention » dans des affaires
particulières mais défend le principe de remontées d’informations. Il
s’est par ailleurs engagé à « rendre publiques » les conclusions de
l’Inspection générale de la Justice, saisie concernant une enquête liée à
Nicolas Sarkozy, dans laquelle les fadettes de plusieurs avocats dont
les siennes ont été scrutées.
L’ancien ogre du barreau connaît
l’immense « besoin de moyens » des tribunaux et affirme avoir obtenu des
assurances pour le budget 2021 qui « va accroître le rythme des
créations de postes pour la Justice ».
Par 20 Minutes avec AFP