En transe chaque dimanche sur la scène de son église
montréalaise, l’apôtre Patrick Isaac
promet des « mégamiracles » et la
réussite financière. Depuis 20 ans, des centaines de fidèles, dont des
vedettes du showbiz et du sport, fréquentent son église à laquelle ils
versent de nombreuses offrandes et même leur premier salaire de l’année.
Mais plusieurs ex-croyants qui ont réussi à sortir de son emprise
affirment avoir perdu des dizaines de milliers de dollars aux mains de
ce gourou qui est en réalité criblé de dettes.
L’humoriste Rachid Badouri et son gérant Steve Rasier, l’acteur et
chanteur Gardy Fury, l’ancien joueur du Canadien Georges Laraque,
l’humoriste Eddy King et le boxeur Éric Barrak ont tous en commun
d’avoir croisé le chemin de l’apôtre Isaac depuis la fin des années
1990.
Même Éliane Gamache-Latourelle, la pharmacienne qui se prétendait
millionnaire à 30 ans, mais qui est aujourd’hui sans le sou, assistait à
sa cérémonie de dimanche dernier.
L’apôtre Isaac et son épouse Éliane Isaac dirigent l’église Parole
qui libère (PQL) depuis un bâtiment de deux millions $ construit en
partie par des fidèles et nommé le Centre Action, dans Saint-Léonard.
Leur mission : infiltrer avec les principes de Dieu le
gouvernement, les médias et les différents secteurs de la société pour
qu’ils puissent passer à une autre dimension, selon les dires de
l’apôtre Isaac dans une entrevue donnée à un journal haïtien en 2015.
Au terme d’une enquête de plus de deux mois, une dizaine d’ex-membres de PQL ont accepté de révéler au Journal ce qu’ils avaient pu observer au sein de ce groupe religieux où l’apparence et l’argent font foi de tout.
« Nous étions programmés à donner notre argent. Tout ce qui
rentrait sur mon compte bancaire je leur donnais, c’était devenu un
réflexe », explique Niorline Charlot qui a passé 14 ans au sein du
groupe religieux de l’apôtre Isaac.
La plupart des autres ex-fidèles ont requis l’anonymat. Ils disent
craindre des représailles tant l’emprise qu’exerce l’apôtre est
importante.
Nous vous présentons leurs témoignages aujourd’hui et demain.
Certains racontent avoir donné tout ce qu’ils possédaient, au point de
faire faillite et de penser au suicide.
Faits troublants
- L’apôtre Isaac inciterait les fidèles à lui verser l’intégralité de leur premier salaire de l’année, 10 % de leurs revenus ainsi que de nombreuses « offrandes sacrificielles ».
- Des fidèles sont invités à cotiser pour de somptueux cadeaux d’anniversaire destinés à l’apôtre et sa femme tels que des voitures Mercedes et Porsche, des voyages dans le sud et des billets pour le Super Bowl.
- L’apôtre Isaac met en avant son succès et sa réussite, mais a déclaré une faillite personnelle en 2016, visé par des réclamations du fisc totalisant 635 000 $.
Le Journal a été témoin sur place d’une des cérémonies où
les louanges de centaines de spectateurs répondent aux cris du pasteur
surexcité au pied d’énormes écrans.
Les images les plus spectaculaires de ces offices sont utilisées
par Patrick Isaac et son équipe pour fabriquer des capsules vidéo dont
la réalisation rappelle celle des bandes-annonces de superproductions
hollywoodiennes. Ces clips inondent ensuite les réseaux sociaux dans
l’espoir d’attirer de nouveaux fidèles.
Dans une entrevue, Steve Rasier, gérant de Rachid Badouri, pasteur
au sein de PQL et représentant de Patrick Isaac, a nié les allégations
de manipulation portées par les ex-fidèles contre l’apôtre et son
organisation. Il indique que PQL n’oblige personne à verser de l’argent
et estime que les fidèles le font par conviction personnelle.
– Avec la collaboration de Ève Lévesque, Jean-Louis Fortin,
Marie-Christine Noël, Antoine Lacroix, Jean-François Cloutier et Andrea
Valeria
Par Camille Garnier
Source:journaldemontreal.com