Dans un document de 29 pages, Dominique Strauss-Kahn présente son
analyse de la Zone franc et
fait une série de proposition de réformes.
L'ancien directeur du FMI plaide pour modifier en profondeur le
fonctionnement du Franc CFA, dont les inconvénients fragilisent selon
lui les économies de la région.
Dominique Strauss-Kahn a publié vendredi 13 avril une note
intitulée « Zone franc, pour une émancipation au bénéfice de tous »,
dans laquelle il expose ses propositions de réforme du Franc CFA.
L’ancien directeur-général du FMI – qui conseille dorénavant des
gouvernements, et notamment le Congo-Brazzaville comme le révélait en
août 2017 l’hebdomadaire français Challenges – souligne la
bonne performance de la Zone franc au niveau macroéconomique, grâce à la
garantie dont elle bénéficie. Mais il estime que « le problème
politique devient de plus en plus sensible comme l’ont montré les
protestations de l’été 2017 ».
Des limites de la Zone Franc
« Les choix monétaires ont une dimension technique incontournable.
Mais ils procèdent toujours, par ailleurs, d’un choix politique », écrit
DSK. « Le caractère inexprimé du lien politique ne peut que favoriser
un doute identitaire au sein d’une Afrique dont le rapport au passé
colonial est particulièrement complexe et difficile à expliquer. »
En plus de « certains aspects pratiques [qui] nourrissent en Afrique
le soupçon de néo-colonialisme » – dénomination « franc », dépôt des
réserves auprès du Trésor français -, la Zone franc présente plusieurs
défauts « qui en limitent les potentiels bienfaits », note l’ancien
directeur-général du FMI. Il pointe notamment la quasi-impossibilité de
modifier la parité et l’absence de dissociation entre les régions
d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale.
La France assume, seule, un risque financier non rémunéré, pour lequel l’opinion africaine ne lui accorde guère de crédit
De même, « la détention de réserves africains, […] ne représente pas
l’avantage que certains imaginent ». Ainsi « la France assume, seule, un
risque financier non rémunéré, pour lequel l’opinion africaine ne lui
accorde guère de crédit et dont le bénéfice commercial est partagé avec
toute la zone euro », juge l’ancien ministre français de l’Économie. «
L’avantage tiré de la parité fixe CFA-euro s’étend aux autres pays de la
zone euro (qui ne participent à la couverture du risque », écrit-il
encore.
Une autre limite de la Zone franc, selon DSK, est celle de la
faiblesse de l’intégration régionale :« Le marché commun est encore
inachevé en Afrique de l’Ouest (région dotée de traditions d’échanges)
et il est demeuré en grande partie nominal en Afrique Centrale (régions
de forêts aux échanges traditionnellement limité et, aujourd’hui, sous
l’empire de la rentre pétrolière) », écrit-il.
Une réforme en profondeur du Franc CFA
DSK s’inquiète d’une réforme du Franc CFA
qui ne serai que cosmétique. « Les symboles du lien avec la France sont
autant de sujets permettant de changer à peu de frais l’image du franc
CFA », mais ces modifications laisseraient en l’état les faiblesses de
la Zone franc et rendraient les modifications de la parité encore plus
problématique, affaiblissant les petits pays.
En conséquence, Dominique Strauss-Khan recommande une réforme plus en
profondeur de la Zone franc. Il propose notamment la réattribution des
sièges de la France au sein des instances des banques centrales
africaines à des administrateurs internationaux indépendants, l’ancrage à
un panier de monnaie plutôt qu’à l’euro, une meilleure coordination
économique des économies de la région et un processus d’élargissement de
l’Uemoa, notamment au Ghana.
C’est aux termes des Traités l’Union européenne qui est compétente en matière d’accord de change
Pour mener à bien ces réformes, 3 conditions pour DSK : une
amélioration du dialogue avec les autorités africaines, « une
communication mettant l’accent sur le renforcement de la monnaie » et
une meilleure association des partenaires européens ainsi qu’une
promotion de la coopération entre la BCE et les banques centrales
africaines, rappelant que « c’est aux termes des Traités l’Union
européenne qui est compétente en matière d’accord de change, non point
ses États-membres ».
Source: jeuneafrique.com