![A trop compter sur la Chine, l’Afrique pourrait connaître de sérieuses difficultés](https://www.agenceecofin.com/images/news/2007-58766-a-trop-compter-sur-la-chine-l-afrique-pourrait-connaitre-de-serieuses-difficultes_L.jpg)
rès rapidement la Chine est devenue le
premier partenaire des échanges commerciaux africains,
avec un volume de
près de 114 milliards $ à la fin 2016, et une part de marché de près de
14% des échanges du continent. Une dynamique positive qui a explosé
alors que l’empire du milieu était tourné vers les investissements.
Aujourd’hui les choses évoluent et l’Afrique pourrait compter sur la
consommation chinoise en hausse, pour maintenir et diversifier certains
flux de revenus. Mais même ce segment de l’économie du partenaire No1
fait face à des défis.
La Chine est aujourd’hui sans aucun doute le plus grand
partenaire commercial de l'Afrique, avec des échanges qui, à la fin
2016, ont atteint les 114 milliards de dollars, soit environ 14% du
commerce international réalisé par les pays du continent. Toutefois, les
matières premières ont continué de représenter plus de 80% du total des
importations chinoises en provenance d'Afrique. Les volumes de produits
manufacturés eux sont demeurés faibles, à 7%, bien que leur part était
en légère augmentation.
![china retail consumer](https://www.agenceecofin.com/images/hebdo/20180720/china-retail-consumer-.jpg)
Cet âge d’or semble bientôt dépassé.
Ainsi, dans leurs différentes stratégies de
diversification, les pays africains ont misé sur une Chine, qui avait
besoin de leurs minerais pour la réalisation de nombreux investissements
infrastructurels. Mais cet âge d’or semble bientôt dépassé. L’économie
chinoise fait face à une série de vents contraires qui, à terme,
pourrait négativement impacter les besoins exprimés pour les matières
premières africaines.
Mais cet âge d’or semble bientôt dépassé. L’économie
chinoise fait face à une série de vents contraires qui, à terme,
pourrait négativement impacter les besoins exprimés pour les matières
premières africaines.
De récents indicateurs statistiques sur ce pays, font
effectivement ressortir que la croissance des investissements dans les
infrastructures chinoises a été de seulement 12% à la fin du mois de mai
2018. Une note qui, bien que positive, est sensiblement plus faible que
les 20% de croissance qu’on avait observé sur la même période en 2017.
Ainsi, des dizaines de projets annoncés pour l’année en cours ont été
mis en veilleuse ou suspendus.
Une baisse du rythme des investissements qui plombera la demande chinoises pour les matières premières africaines
Cette baisse dans le rythme du développement des
infrastructures en Chine est liée à plusieurs facteurs. L’un d’eux est
que le gouvernement du président Xi Jinping, est en train d’évaluer
l’efficience du stock des infrastructures actuelles. Le deuxième réside
dans la volonté de réduire le poids de la dette publique du pays.
En 2016, les banques chinoises ont accordé un volume
record de prêts de 12 650 milliards de yuans (1880 milliards de
dollars), le gouvernement ayant encouragé les mesures de relance
financées par le crédit pour atteindre son objectif de croissance
économique. A la fin du mois de mars 2018, l’encours global des prêts
accordés aux entités publiques en Chine, atteignait les 5963,4
milliards $, représentant 47% du produit intérieur brut. Cette somme est
très souvent empruntée auprès des banques, elles aussi publiques, pour
le financement d’investissements, dont certains servent surtout à
augmenter le nombre des emplois et ne présentent pas une rentabilité
suffisante pour assurer le remboursement de cette gigantesque dette
publique.
Ajouté à ce problème, le gouvernement chinois doit
faire face à la guerre commerciale que lui a déclaré directement
l’administration américaine dirigée par Donald Trump. Techniquement, les
250 milliards $ de droits de douanes qui sont désormais imposés sur des
produits chinois en entrant sur le sol américain, ne sont pas le plus
gros problème. Le défi, derrière, est que, dans une situation où le
gouvernement central doit trouver des solutions à la dette publique, il
lui sera difficile de contenir la menace d’une baisse de ses
importations, qui selon des analystes de la banque américaine JP Morgan,
impacte indirectement plusieurs secteurs dans la chaine des valeurs des
produits concernés.
Ajouté à ce problème, le gouvernement chinois doit
faire face à la guerre commerciale que lui a déclaré directement
l’administration américaine dirigée par Donald Trump.
Enfin, on peut relever le récent accord commercial
signé entre l’Union Européenne et le Japon, qui risque d’isoler
davantage l’économie chinoise.
La hausse de la consommation chinoise comme une alternative ?
Face à ces contraintes qui menacent les ambitions
d’investissement de la Chine, les analystes de l’agence américaine de
notation Moody’s, ont estimé, qu’une opportunité pour l’Afrique, réside
dans la migration de ce pays vers une économie de consommation. Mais les
bénéfices de ce changement seront différemment ressentis par les pays
du continent.
La demande chinoise pour des produits comme le cuivre,
le cobalt et l'aluminium restera forte. Ces métaux non ferreux sont
largement utilisés pour produire des voitures, des appareils
électroniques domestiques et des transports susceptibles de bénéficier
de la consommation chinoise. En outre, l'initiative « Made in China 2025 »
devrait également accroître la demande pour ces métaux. Toute chose qui
bénéficiera à des pays comme la République Démocratique du Congo ou
encore la Zambie.
De même, les analystes de Moody’s font savoir, que les
exportations de produits alimentaires vers la Chine, telles que les
oléagineux (huiles végétales), ont également augmenté au cours des
dernières décennies et que cela devrait continuer. Cela profiterait à
des pays tels que le Sénégal ou encore l'Éthiopie, un pays où la Chine
investit massivement.
L’arrivée des touristes chinois en Afrique reste
faible (1,5% du total des touristes chinois sortants), mais ils ont
augmenté de 30% par an depuis 2012.
Enfin, l'augmentation des niveaux de revenus en Chine
implique également un changement des préférences de consommation vers
des produits et des expériences plus sophistiqués, tels que le tourisme.
![touristes chinois](https://www.agenceecofin.com/images/hebdo/20180720/touristes_chinois.jpg)
L’arrivée des touristes chinois en Afrique a augmenté de 30% par an depuis 2012.
Les arrivées de touristes internationaux en Afrique ont
déjà augmenté de 8,1% en 2016 selon l'Organisation mondiale du
tourisme. L’arrivée des touristes chinois en Afrique reste modeste (1,5%
du total des touristes chinois sortants), mais ils ont augmenté de 30%
par an depuis 2012.
Une consommation menacée par une hausse importante de la dette des ménages
Sur cette opportunité que la consommation chinoise
représente pour l’Afrique, plane tout de même une grosse hypothèque.
C’est celle de la structure des revenus et de la dette des ménages de ce
pays. Selon des statistiques officielles chinoises, depuis 2007, la
part de la production de richesse nationale chinoise destinée aux
ménages a diminué, de 46% à 42% du PIB. Le reste du revenu national de
la Chine est principalement capté par les entreprises contrôlées par le
gouvernement et leurs dirigeants d'élite. La part du revenu des ménages a
diminué d'environ 1 point de pourcentage rien qu’en 2017.
Depuis 2007, la part de la production de richesse
nationale chinoise destinée aux ménages a diminué, de 46% à 42% du PIB.
Le reste du revenu national de la Chine est principalement capté par les
entreprises contrôlées par le gouvernement et leurs dirigeants
d'élite.
A côté de cela, on a aussi pu observer une baisse de la
valeur des actifs boursiers. Depuis le début 2018, le principal indice
de la Bourse de Shanghai était en recul de 15,7% au 16 juillet 2018. Sur
les trois dernières années, ce repli est de plus de 32,8% selon des
indicateurs de la plateforme Trade Economics. Ainsi, même si le nombre
de millionnaires chinois augmente et que les revenus individuels ont
aussi connu une courbe ascendante, la masse des consommateurs se trouve
confrontée à la baisse des emplois et des revenus potentiels générés par
les plus-values boursières.
![chine conso](https://www.agenceecofin.com/images/hebdo/20180720/chine_conso.jpg)
L’endettement des ménages qui a progressé bien plus vite que la croissance économique.
Mais la plus grande menace à laquelle font face les
consommateurs chinois est la hausse de l’endettement des ménages qui a
progressé bien plus vite que la croissance économique ces dernières
années, à un rythme moyen d’environ 23%. Ainsi, alors que les revenus
ont été multipliés par près de 3 dans le pays, la dette des ménages elle
a été multipliée par 9.
La hausse de l’endettement des ménages a progressé
bien plus vite que la croissance économique ces dernières années, à un
rythme moyen d’environ 23%. Ainsi, alors que les revenus ont été
multipliés par près de 3 dans le pays, la dette des ménages elle a été
multipliée par 9.
Dans un rapport publié par la Banque internationale de
règlement, il ressort que le poids de la dette des ménages au 31 mars
2018 était de 6141,3 milliards $ et représentait un ratio proche de 50%
du Produit intérieur brut. Lorsqu’on rapproche cette dette du revenu net
qui revient aux consommateurs chinois, on réalise qu’elle en représente
102% de la valeur.
Ainsi, la baisse des investissements chinois pourrait
être compensée par une hausse subséquente de la consommation, pour
maintenir les flux d’exportations africaines vers ce pays. Mais cette
consommation devra être suivie avec attention par les dirigeants
africains, car elle est menacée par une hausse de l’endettement des
ménages. Un défi, sur lequel les autorités chinoises n’ont pas encore
donné des pistes de solution.
Idriss Linge
Source: Agence ecofin