En Afrique du Sud, le nouveau président Cyril Ramaphosa a prononcé son premier discours sur l'état de la nation ce vendredi 16 février, devant le Parlement au Cap. Un discours largement consacré aux questions économiques et à la lutte contre la corruption.
Avec ce discours sur l'état de la nation, Cyril Ramaphosa a opéré
un retour aux sources du Congrès national africain de Nelson Mandela,
qu'il a cité d'entrée de jeu.
Souriant, volontiers espiègle, le nouveau président sud-africain a
mis l'emphase sur le dialogue avec l'opposition, et le respect du
peuple, avec le souci affiché de fédérer et de ramener la confiance en
Afrique du Sud.
Cyril Ramaphosa était très attendu sur le volet économique, alors que l’Afrique du Sud fait face à une croissance très faible
et à un chômage endémique, particulièrement chez les jeunes. Le nouveau
président a donc mis sur la table une série de mesures très concrètes
pour favoriser l’emploi.
Il a notamment annoncé un sommet sur l’investissement, qui devrait se
tenir dans les prochains mois. Il donne aussi des garanties à son
parti, en rappelant que son gouvernement compte accélérer son programme
de redistribution des terres en procédant à des expropriations sans
compensations. Cette mesure avait déjà été annoncée lors de la
conférence élective de l’ANC au mois de décembre.
Réforme agraire
« Comme l'agriculture demande des terres, nous allons accélérer notre programme de redistribution, a promis le nouveau chef de l'Etat.
Non seulement pour corriger une grave injustice historique mais aussi
pour amener plus de producteurs vers le secteur agricole et offrir plus
de terres cultivables à notre peuple. (...) Notre approche inclura
l'expropriation de terres sans compensations financières. »
« Nous sommes déterminés, a-t-il insisté. Nous demandons
d'ailleurs tout spécialement aux institutions financières de notre pays
de devenir nos partenaires dans la mobilisation de ressources afin
d'accélérer le programme de redistribution de terres et de traiter
l'agriculture comme un secteur pourvoyeur d'emplois et prometteur. »
Cyrill Ramaphosa sur la réforme agraire
Lutte contre la corruption
Mais les annonces les plus importantes portent, comme attendu, sur la lutte contre la corruption,
notamment au sein des entreprises publiques, mal-gérées et pour
certaines au bord de faillite. Dorénavant, les membres des conseils
d’administration ne seront plus impliqués dans les appels d’offres et
l’attribution des marchés publics, qui seront confiés à des consultants
extérieurs.
Cyril Ramaphosa sur la lutte contre la corruption
Par ailleurs, Cyril Ramaphosa
promet que des moyens seront alloués à la justice pour enquêter sur les
affaires de corruption au sommet de l’Etat. Il a promis que « les responsables de malversation seraient identifiés » et que la justice les « sanctionnerait ».
La commission d’enquête sur « la capture de l’Etat » doit commencer
son travail très bientôt. Les responsables de malversations seront
identifiés pour rétablir la confiance dans les institutions, a-t-il
promis.
Ramaphosa a également annoncé qu’il comptait réduire la taille du
gouvernement et des ministères. Ce remaniement devrait survenir dans les
prochains jours.
On doit rendre hommage à
Madiba en laissant derrière nous l'ère de la discorde, l'ère des
divisions, l'ère de la désillusion qui a balayé notre pays. On doit
laisser derrière nous toute l'époque où l'on a perdu confiance en nos
institutions, et en nos représentants de l'Etat. On doit laisser
derrière nous tout ce qui est négatif et qui a gangréné notre pays,
parce qu'un nouveau départ nous attend. Un fantastique départ est là...
■ Dans les rues de Johannesburg, Ramaphosa attendu au tournant
Devant l'un des nombreux resto-rapides de Johannesburg, Vuso est venu
chercher à manger après l'heure et demie du discours de Cyril
Ramaphosa. Il ne vote pas ANC mais voit l'Afrique du Sud entrer dans une
nouvelle ère. Pour lui, « la partie la plus intéressante du discours était celle où il a dit "c'est le moment de travailler ensemble pour reconstruire l'Afrique du Sud !" Ca change tout le scénario. »
Il semble que Ramaphosa ait fait l'unanimité. Thulani l'a écouté en
conduisant son taxi. Après les mots, il attend des actions concrètes. « Il
a annoncé tout un tas de mesures positives. Mais c'est au moment où il
devra toutes les appliquer que l'on verra le vrai Cyril Ramaphosa. On
verra alors s'il respecte ou pas ses engagements. Mais pour l'instant,
c'était juste un discours. »
Son très attendu programme de lutte contre la corruption a été l'un
des temps forts du discours de Ramaphosa. Pour certains, il apparaît
plus honnête que Jacob Zuma, mais il faut se méfier de lui, selon Vukile
: « Je ne sais pas si quelque chose va changer. Ce n'est pas une
question d'éducation, c'est une question de prendre des actions contre
la corruption. Vous pouvez ne pas être éduqué et être honnête, mais vous
pouvez aussi bien être éduqué et corrompu. »
Cyril Ramaphosa est prévenu, les Sud-Africains seront très attentifs à ce qu'il respecte ses promesses.