Le Bitcoin comme les autres crypto-monnaies ne sont plus
seulement la cible des cyber-
délinquants. Le banditisme classique s'y
intéresse car cet argent est bien plus facile à "blanchir" que l'or ou
les espèces.
Il y a quelques jours, des malfaiteurs ont
contraint sous la menace d’une arme des possesseurs de cyber-monnaies à
effectuer un virement. Une première, peut-être, mais "il faut s’attendre
à ce que ces affaires se multiplient", estime Éric Larchevêque,
président fondateur de Ledger, cette start-up française qui a créé un
coffre-fort pour ces valeurs. Il explique que s’il s’agit d’argent
virtuel, le bitcoin a des points communs avec l’argent liquide ou l’or.
"On connaissait les cyber-attaques, on sait désormais que des agressions
physiques permettent aussi de détrousser les possesseurs de
crypto-monnaies".
En effet, si le bitcoin, ou tout autre
cyber-monnaie, est en ligne, il n’en est pas moins aussi accessible que
des lingots ou des billets entreposés dans le coffre d'un appartement.
Pour y accéder, les malfrats menacent physiquement la personne ou ses
proches. À l'instar de ce qu'ont vécu en Grande-Bretagne ce couple de
traders forcés de transférer sur un compte les avoirs qu’ils
possédaient. On ne connaît ni le montant du vol, ni dans quelle devise
il a été réalisé.
Tout peut s’envoler en un clic
Ce
hold-up va évidemment faire l’objet d’une enquête, mais il ne sera pas
facile pour la police d’interpeller les coupables. Elle va évidemment
interroger les proches, ceux qui savaient que les victimes possédaient
ces richesses. Mais en l'espèce, ce sont des dizaines de milliers de
personnes sur toute la planète qui pouvaient avoir accès à cette
information.
Les traders ont bien fait attention de ne pas trop en
dire sur eux. Ils utilisaient un pseudonyme pour effectuer les
transactions. Mais des internautes ont fait circuler leur véritable
identité. "Que l’on possède de l’or, des bijoux, de l’argent ou des
bitcoins, il faut être discret que ce soit dans la vie réelle ou dans le
monde virtuel", rappelle Éric Larchevêque.
Ne pas suivre ce
conseil est encore plus risqué quand on détient un magot
en crypto-monnaies, que pour un compte bancaire. Les retraits avec une
carte sont limités, les vols sont assurés et au moins une partie des
sommes soustraites sont remboursées par les banques. La victime a peu à
perdre contrairement au monde virtuel où tout peut s’envoler
définitivement en un clic.
S'inspirer du réel pour la protection virtuelle
"Avec
de l’argent réel, un voleur à main armée est limité par ce que vous
avez dans votre portefeuille ou la limite quotidienne de retrait dans un
distributeur. Mais un voleur de bitcoins peut voler des millions de
dollars instantanément", confirme sur Twitter Nouriel Roubini, un expert
international de la cyber-économie.
Et pas facile de retrouver
les valeurs même si les monnaies virtuelles sont traçables dans la
blockchain. On peut encore faire un parallèle avec des lingots d’or
numérotés. Toutefois, l’or se fond et les crypto-monnaies se noient dans
le web sans laisser de traces. Pour preuve, les sommes volées lors des
cyber-braquages qui se sont produits se sont évaporés. Le dernier
braquage en date remonte à quelques jours. Il s’élève à plus de 400
millions de dollars en bitcoin. Coincheck, l’établissement financier qui
détenait cette fortune, n’a eu d’autres choix que de rembourser ses
clients.
S’il faut être discret pour protéger ses avoirs, il faut
aussi développer des méthodes pour les protéger. Et pour Éric
Larchevêque, il faut peut-être s’inspirer du monde réel. "Les valeurs du
monde réel sont entreposées dans des coffres sécurisés qui, pour les
ouvrir, nécessitent plusieurs autorisations et disposent d’ouverture
retardée", explique ce spécialiste de la protection.
"Nous étudions ces techniques pour une prochaine version de notre
coffre-fort électronique". En attendant, la discrétion reste la
protection la plus sûre. Quant aux enquêteurs, ils devront non seulement
tenter de retrouver les fonds, les coupables et chercher à savoir si la
victime est vraiment innocente comme le cas s'est produit en 2015 lors
de l'affaire MtGox dans laquelle le patron de l'entreprise, un Français,
a été arrêté au Japon.