![L’Algérie plongée dans l’incertitude](https://img.aws.la-croix.com/2019/06/03/1201026392/Manifestation-Alger-31_0_730_365.jpg)
Le dialogue comme unique voie pour un règlement souple de la crise fait l’unanimité tant chez le
Mais force est de constater que le projet a pris des allures
d’Arlésienne : on en parle, mais on ne le voit pas. On multiplie les
appels et les professions de foi, mais aucune action concrète n’est
entreprise pour permettre l’amorce de discussions autour d’une feuille
de route ou d’un plan de sortie de crise accepté par tous.
Le dernier appel dans ce sens émanant du pouvoir remonte à deux
semaines. Le 6 juin au soir, le chef de l’État par intérim réitérait,
dans un message à la Nation, son appel à « la classe politique, la
société civile et les personnalités patriotique nationales à opter pour
le dialogue inclusif en tant que voie menant à la participation au
processus de concertation que l’État s’emploiera à organiser dans les
meilleurs délais… ».
Depuis, point de pas concret. Abdelkader Bensalah n’a certes pas fixé
d’échéance, encore moins de deadline. Organiser un processus de
concertation « dans les meilleurs délais » est un engagement bien trop
vague pour crier dès à présent à l’échec ou à la promesse non tenue. À
plus forte raison quand on se rappelle qu’un appel similaire avait été
lancé le 5 mai avec la même solennité sans que les choses ne bougent
durant tout le mois de ramadhan.
L’idée est partagée, même par une partie de la rue et des animateurs
du mouvement populaire, mais elle tarde à se cristalliser à cause
principalement d’un double problème de confiance entre le pouvoir et la
classe politique d’abord, et entre les composantes de cette dernière
ensuite.
Les initiatives individuelles, et même collectives, n’ont pas manqué
et on a même cru un moment que le cap de la concertation est
définitivement pris et que la fin de la crise est proche. Le 11 juin,
l’opposition politique avec toutes ses obédiences a annoncé la tenue
d’une conférence pour la fin du mois pour officialiser une feuille de
route sur laquelle un semblant d’accord aurait été trouvé.
Simultanément, la société civile a multiplié les conclaves. Les 8 et 15
juin, plus de 70 syndicats, associations, conseils de l’ordre et
organisations de défense des droits de l’Homme ont longuement débattu
pour sortir avec un plan de sortie de crise consensuel.
Le hirak imperturbable
Le texte a fait naître de réels espoirs, d’autant qu’il coïncidait
avec la disposition exprimée par les autorités via des voix officieuses à
partager la poire en deux concernant les hommes clés hérités de
Bouteflika, laissant entendre que Noureddine Bedoui allait démissionner
et qu’un gouvernement de compétences va prendre le relais. Il restait à
attendre que l’opposition politique calque, à l’issue de la conférence
annoncée, sa vision sur celle de la société civile pour disposer d’une
feuille de route unique.
Un tel consensus servirait à la fois de contre-argument à la
littérature du pouvoir qui justifie son attachement à la « solution
consensuelle » par l’absence de propositions « sérieuses » et de quitus
pour les représentants du hirak et de l’opposition qui prendraient part
au dialogue qui s’ensuivrait.
Sauf qu’à la différence de la société civile, la classe politique a
des clivages plus profonds à transcender. Mardi 18 juin, un appel a été
lancé aux « forces de l’alternative démocratique ». Il a été signé par
sept partis de la mouvance démocratique sans les autres obédiences, ce
qui est au moins un signe inquiétant pour la concrétisation du consensus
annoncé.
Cependant, la rue, soit la partie dont l’attitude compte le plus,
reste constante tant dans sa mobilisation que dans son unité. Lors du
17e vendredi, les manifestants ne se sont pas laissé distraire par la
mise d’Ouyahia et de Sellal à l’ombre. Hier, lors du 18e vendredi, ils
ont apporté une réponse sans équivoque au dernier discours du chef
d’état-major de l’ANP qui avait appelé à interdire le drapeau amazigh
dans les manifestations.
Les Algériens ont réitéré les revendications du hirak avec la même
détermination, ne laissant guère le choix au pouvoir, à la classe
politique et à la société civile quant à la teneur et aux objectifs du
futur dialogue. Si dialogue il y aura…
Par tsa-algerie.com